Dygest vous propose des résumés selectionnés et vulgarisés par la communauté universitaire.
Voici le résumé de l'un d'entre eux.
de Andreas Antonopoulos
Particulièrement adressé aux développeurs, aux programmeurs et aux codeurs, Au cœur du Bitcoin permet aussi au profane de découvrir le monde complexe de la plus connue des cryptomonnaies. À contre-pied du modèle économique classique, le Bitcoin repose sur un système horizontal d’échange direct et décentralisé dans lequel chaque utilisateur est souverain, en dehors de tout système bancaire et à la marge des marchés financiers. Ce livre enseigne les fondamentaux du Bitcoin, la structure du peer-to-peer et les principes de la blockchain. C’est un outil complet pour qui désire développer des logiciels d’utilisation du Bitcoin.
Socle indispensable de toute activité économique, autrefois frappée au marteau, aujourd’hui au laser, la pièce de monnaie qui circule partout dans le monde existe depuis environ sept siècles avant Jésus-Christ. Unité de compte, intermédiaire d’échanges et réserve de valeur, elle a changé de forme sans changer de rôle au fil des époques. Autrefois régalienne, elle était fournie par les souverains, puis par les états qui ont fini par déléguer cette responsabilité aux banques centrales qui décident aujourd’hui quelle quantité de monnaie doit circuler sur les marchés.
Le développement d’Internet et la dématérialisation progressive des opérations ont récemment fait apparaître de nouvelles monnaies remettant en cause le modèle économique classique et l’hégémonie des banques. Les cryptomonnaies, virtuelles, sans valeur réelle, car elles ne sont pas adossées à une banque centrale sont pourtant dotées de la valeur d’usage qui leur est attribuée par leurs utilisateurs. Il s’agit alors d’un support de transactions dématérialisé, permettant de procéder à des opérations financières de manière libre et anonyme sans avoir recours à aucun intermédiaire.
Le Bitcoin est une monnaie numérique fabriquée et gérée par des algorithmes, sans équivalent matériel, qui sert pourtant à acheter, à payer, elle a un cours fluctuant, elle a donc la même valeur que de l’argent réel. Sa différence remarquable, novatrice, est qu’elle est émise par ses utilisateurs via un mécanisme de consensus décentralisé, résultat de l’interaction de quatre processus indépendants : chaque transaction est vérifiée selon des critères précis ; ces transactions sont ensuite insérées dans un bloc via un algorithme de preuve de travail ; les blocs sont eux-mêmes contrôlés avant d’être assemblés dans une chaîne ; la sélection indépendante de la chaîne contenant le plus de preuves de travail.
Comment fonctionne ce système assez complexe ? Comment acquérir des bitcoins et comment les utiliser ? Qui veille sur les bitcoins d’un utilisateur puisqu’ils ne sont pas dans une banque ? Comment est assurée la sécurité d’une monnaie électronique ? Qui se charge de la comptabilité et des écritures ? Autant de questions qui donnent aux cryptomonnaies un aspect assez ésotérique pour qui n’est pas initié à la blockchain.
En octobre 2008, un certain Satoshi Nakamoto diffuse sur Internet un document de 9 pages intitulé : « Bitcoin : a peer-to-peer Electronic Cash System ».
Ce document, désormais connu sous le nom de Livre blanc du Bitcoin se résume ainsi : « Une version exclusivement pair-à-pair d’argent électronique permettrait aux paiements en ligne d’être envoyés d’une personne à une autre sans passer par une institution financière. » (p. 321) Est-ce l’essence de la création de cette monnaie ? S’affranchir du système classique de l’économie de marché ? Ce qui est sûr c’est que le message pose le principe d’une organisation sans hiérarchie.
Dans un réseau peer-to-peer, il n’y a ni central ni serveur, tous les ordinateurs reliés se trouvent au même niveau. Les spéculations sont allées bon train pour deviner qui se cachait derrière le nom de Satochi Nakamoto qui n’est pas une personne mais sans doute le pseudonyme d’un groupe de développeurs. Un certain goût du mystère qui se retrouve d’ailleurs au cœur du bloc de genèse, tout premier bloc utilisé pour initialiser la blockchain Bitcoin.
En effet, caché à l’intérieur, « l’entrée de transaction coinbase contient le texte : “The Times 03/Jan/2009 Chancellor on brink of second baillout for banks.” ce message était destiné à offrir la preuve de la date de création de ce bloc, en se référant au titre britannique du journal The Times. C’est aussi un rappel pince-sans-rire de l’importance d’un système monétaire indépendant, avec le lancement de Bitcoin en même temps qu’une crise monétaire mondiale sans précédent. » (p. 209).
Quoi qu’il en soit Bitcoin propose l’ambitieux projet d’un système monétaire transparent et ouvert tout en garantissant à ses utilisateurs la tranquillité face à Big Brother puisqu’il n’est pas nécessaire de dévoiler ses données personnelles pour l’utiliser.
Bitcoin est une monnaie virtuelle décentralisée qui circule et s’échange directement sur Internet, mais qui peut aussi être dépensée dans l’économie réelle si un commerçant l’accepte. Son système est développé et entretenu par une communauté ouverte d’utilisateurs. Cette cryptomonnaie est fabriquée par une technologie originale : la blockchain, un système d’enregistrement électronique ouvert dans lequel sont transmises et stockées toutes les informations et toutes les transactions.
Pour pouvoir payer en bitcoins il faut détenir un portefeuille électronique qui peut être obtenu soit via un logiciel chargé sur Internet, soit via une application pour smartphone soit en se rendant sur un site qui permet la création et la gestion de son portefeuille virtuel. Un portefeuille Bitcoin peut être conservé comme n’importe quel fichier, il est possible d’en faire des sauvegardes, il peut même être imprimé.
Comment obtenir des bitcoins ? En vendant un bien ou un service payé en bitcoins ; par parrainage, en achetant des bitcoins à une personne de son entourage ; dans certaines grandes villes via des distributeurs échangeant du cash contre un virement de bitcoins ; enfin, dans certains pays, il est possible d’effectuer du change dans certaines banques.
Cependant il est important de savoir que le taux de change du Bitcoin varie sans arrêt. C’est une monnaie récente, indépendante, non régulée et qui pèse encore peu sur le marché mondial. Fonctionnant sur le principe de l’offre et de la demande, elle fluctue en permanence, mais plus le nombre de ses utilisateurs augmentera plus elle se stabilisera. Pour éviter l’inflation, le nombre de bitcoins circulant sur le marché est plafonné à 21 millions. Cela devrait se produire vers l’année 2140. De nombreux sites permettent de connaître le taux de change en temps réel.
À sa création en 2009, le bitcoin valait 0.001 $ (100 000 Bitcoins pour 100 $). Après une chute remarquable autour de 200 $ en 2015, il est remonté en 2017 autour de 1000 $ puis vers un spectaculaire 20 000 $ pour redescendre fin 2017 à 15 000 $. Heureusement, un bitcoin peut être découpé jusqu’à 8 chiffres après la virgule. Il est donc possible de posséder 0.01 bitcoin ou 100 millibitcoins ce qui correspond plus ou moins à 10 $.
Finalement plus proche de l’unité de compte que de l’argent physique, le bitcoin n’existe que sur support numérique. Stocké sur des disques durs ou sur des plateformes d’échange en ligne, il n’est, en réalité, rien d’autre qu’une longue suite de chiffres codés. Il faut donc des clés pour y accéder.
Ces clés sont contenues dans des portefeuilles virtuels. Elles garantissent l’existence des fonds à transférer, et vont servir à effectuer les transactions. En monnaie Bitcoin, il n’existe pas de prélèvement, les seules transactions sont des virements. Chaque utilisateur dispose de deux clés, une clé publique, comparable à un rib mais qui est plutôt une sorte de pseudo qui enverra la transaction sur la blockchain, et une clé privée qui est un code d’accès à ses bitcoins et qui permet de débloquer le virement. Ensuite le protocole de validation (proof of work) de Bitcoin sécurise le tout.
Chaque transaction est validée et enregistrée, elle devient irréversible et publique dès qu’elle est transcrite sur la blockchain tandis que l’utilisateur lui, reste anonyme. Les transactions en bitcoins suivent ainsi une sorte de chaîne de propriété. Un utilisateur paie en autorisant le transfert de ses bitcoins vers le destinataire qui pourra, à son tour, autoriser un transfert vers un autre et ainsi de suite. Chaque transaction prend donc la suite d’une autre pour créer une chaîne dans laquelle chaque transfert verrouille le précédent. Cela constitue des blocs qui contiennent l’ensemble des données cryptées dont l’analyse et l’authentification vont être prises en charge par un réseau décentralisé qui va les valider et les rajouter à la blockchain.
Ces transactions sont validées environ toutes les 10 minutes par les mises à jour des mineurs. Un nouveau bloc contenant les transactions apparues depuis le dernier bloc est miné toutes les 10 minutes en moyenne ajoutant ainsi ces transactions à la blockchain. Les transactions qui font partie d’un bloc et qui sont ajoutées à la blockchain sont considérées comme confirmées ce qui autorise les nouveaux propriétaires de bitcoins à dépenser ce qu’ils ont reçu dans de nouvelles transactions. Celles-ci engendrent des frais qui sont utilisés pour sécuriser le réseau. Ils ne sont pas calculés sur le montant de la transaction en bitcoins, mais sur sa taille en kilo-octets.
La blockchain est la matrice du bitcoin. Comme un gigantesque registre comptable, elle est la base de données contenant l’intégralité des transactions depuis sa création.
C’est un dispositif d’enregistrement partagé, ouvert, horizontal, visible par tous donc réputé infalsifiable. Elle stocke et transmet l’information de la manière la plus sécurisée, en étant indépendante d’une quelconque autorité. Reposant sur un réseau ouvert, la blockchain constitue un système de confiance original, décentralisé, sécurisée par son réseau d’utilisateurs. Chaque transaction est une entrée publique dans la blockchain. Environ toutes les 500 transactions, celles-ci sont regroupées en blocs contrôlés par des ordinateurs qui vérifient que les bitcoins sont bien passés d’un portefeuille à un autre, qu’ils sont vrais, qu’ils n’ont pas déjà été utilisés.
L’historique de chaque transaction est dans la chaîne et il est impossible de faire un copier-coller pour utiliser deux fois les mêmes bitcoins. Il n’y a donc aucun piratage. Pour la fiabilité du réseau tous ses blocs sont reliés entre eux. Pour pouvoir se référer de manière sûre au bloc précédent, chaque bloc est identifié par un hash, une empreinte numérique unique. De plus chacun contient le hash de celui qui le précède. Les suites de hash se succèdent dans la chaîne, Il ne peut donc pas y avoir de « trou » entre deux blocs. Chaque transaction validée dans la blockchain est définitive et sécurisée. Cette traçabilité infaillible permet à tout utilisateur de vérifier n’importe quelle transaction en toute transparence.
Il est impossible d’annuler une transaction, si une personne s’est trompée dans un virement, elle doit simplement en refaire un autre. Chaque nœud, en quelque sorte chaque ordinateur relié au réseau, contient systématiquement une copie intégrale de la blockchain partant du bloc de genèse codé de manière fixe, non modifiable, dans le logiciel Bitcoin de chaque utilisateur. Comme cette copie est perpétuellement remise à jour, lorsqu’un nœud reçoit un bloc de transactions à vérifier, il part toujours du bloc de genèse, donc quand il aura fait tous ses contrôles il sera lui-même fiable pour rentrer dans la chaîne.
Chaque bloc contient un résumé de toutes les transactions dans un arbre de Merkle (une structure utilisée pour résumer et vérifier l’intégrité des grands ensembles de données). Pour assurer encore davantage de contrôle et de sécurité, il existe d’autres blockchain Bitcoin en plus de la principale. Elles servent à effectuer des tests pour lui éviter d’être victime de bug lors de nouveaux développements de logiciels.
Le minage soutient la structure de la blockchain Bitcoin. C’est le mécanisme sur lequel repose la décentralisation donc la sécurité du réseau. On a vu que les transactions sont regroupées dans des blocs. Les opérations de cryptage et de validation des blocks demandent une énorme capacité de calculs mathématiques ainsi qu’un travail informatique très complexe. Ce sont les mineurs qui sont chargés d’effectuer ce travail qui revient à vérifier la validité des transactions. Ils sont tous mis en concurrence. N’importe quel mineur peut traiter un bloc de transactions.
Mais il lui faut pour cela être capable de résoudre un difficile problème mathématique basé sur un algorithme de hachage cryptographique. Un seuil est fixé, une échéance environ toutes les 10 minutes, après quoi le bloc sera terminé et validé. Le premier qui trouve la solution est autorisé à rajouter le bloc sur la chaîne. La compétition pour résoudre l’algorithme est la base du modèle de sécurité de Bitcoin. Lorsque la solution du problème est trouvée, le nouveau bloc est ajouté à la blockchain et le mineur est récompensé. Bitcoin repose sur un réseau peer-to-peer de sorte que tous les ordinateurs se trouvent au même niveau. Cette architecture décentralisée et ouverte fait que ce sont des serveurs différents, n’utilisant pas tous les mêmes protocoles qui sont utilisés pour le minage. Cette caractéristique contribue à sécuriser le réseau.
En remerciement de ce travail, les mineurs reçoivent des bitcoins et perçoivent les frais de toutes les transactions contenues dans le bloc qu’ils ont traité. Il faut cependant savoir que la puissance de calcul nécessaire au minage engendre une énorme consommation d’électricité, un particulier qui souhaiterait se lancer dans le minage n’aurait aucune chance de gagner sa vie. La probabilité qu’il réussisse à obtenir un bloc est trop faible face aux ensembles de mineurs regroupés dans des entrepôts géants qui sont installés près des centrales hydroélectriques.
Rien ne l’empêche cependant de rejoindre un pool de mineurs et de gagner sa part au pro rata de sa capacité. En définitive, ce sont les mineurs qui « fabriquent » les bitcoins.
La transparence, garantie par les mineurs, se revendique bien supérieure à celle du système financier classique. Le fait est que nourrir la blockchain est plus simple informatiquement et plus rentable que vouloir la pirater. Le pirate se retrouverait éjecté du fait que la complexité des calculs (qui s’accroît au fur à mesure de l’allongement de la chaîne) viendrait à bout de son système informatique. Il perdrait tout son investissement. Sans oublier que les mineurs sont rémunérés pour le travail de minage.
La sécurité est basée sur la preuve de travail et non sur le contrôle d’accès. Si l’on compare ce fonctionnement au système bancaire, lors d’un paiement par carte il faut que tout le réseau soit protégé et crypté de bout en bout, car une carte bancaire est « ouverte », son numéro apparaît aux yeux de tous.
Pour ne pas que d’autres l’utilisent frauduleusement, il faut que le réseau soit très sécurisé faute de quoi ses données, voire l’identité de son détenteur peuvent être détournées. Le Bitcoin fonctionne exactement sur la logique inverse, le réseau peut être ouvert, complètement public et transparent puisqu’une transaction se fait à partir de la clé privée, les coordonnées de l’utilisateur n’apparaissent pas sur le réseau. De ce fait il est possible d’effectuer des transactions Bitcoin n’importe où sur n’importe quel réseau wifi même non sécurisé. Avec ce fonctionnement, l’utilisateur Bitcoin a plus de pouvoir, donc plus de responsabilités.
C’est à lui de protéger le secret de ses clés. S’il les perd, il perd ses bitcoins, il n’y a pas de système bancaire pour protéger son argent. Pour beaucoup d’utilisateurs, cela n’est pas si simple notamment sur les smartphones ou les ordinateurs portables. Tout le monde ne sait pas forcément se protéger du piratage de ses clés. Les notions de sécurité informatique sont encore très récentes et les usagers encore peu nombreux à vraiment savoir protéger leurs données. Les ordinateurs sont en permanence exposés à des menaces externes via les connexions Internet. Ils exécutent des milliers d’opérations venues de quantités de logiciels.
Il suffit d’un seul logiciel malveillant pour compromettre tous les fichiers et voler les bitcoins stockés dans les applications de portefeuille. Car si le réseau des transactions bitcoin est très sécurisé, c’est cependant, à chaque utilisateur de prendre en charge la protection de son ou ses portefeuilles.
Ce livre contient toutes les informations techniques pour les développeurs avec les plus récentes évolutions de Bitcoin. Il est complet, très détaillé, illustré et comporte tous les exemples de codes, de listings et autres éléments structurels pour programmer. Créé juste après 2008, on peut comprendre la volonté de Bitcoin de proposer une alternative aux dérives du système monétaire mondial.
À la question concernant l’anonymat des utilisateurs susceptible de couvrir des utilisations douteuses ou totalement illicites (blanchiment, financement du terrorisme…) l’auteur répond que la blockchain est ouverte, publique et qu’elle contient tous les historiques de transactions, justifiant que cela n’en fait pas le meilleur endroit où effectuer des opérations illicites d’envergure. Quoi qu’il en soit, Bitcoin est une technologie nouvelle, sans précédent qui va continuer à se développer et à s’améliorer notamment pour devenir plus accessible aux non-initiés.
Face à un univers bancaire parfois opaque, instable et controversé, Bitcoin propose des solutions novatrices pour financer des projets que les banques ne suivraient pas ou alors avec des coûts trop élevés. Il n’y a aucune condition à remplir pour ouvrir un compte, les données personnelles sont protégées, les frais de transactions plutôt faibles et la monnaie sûre, sans contrefaçon, sans risque d’inflation.
Pour autant le système reste encore très complexe, et, par le fait, peu démocratique, les arguments de l’auteur concernant l’absence de risque de transactions illicites ne sont pas convaincants. Sans oublier le caractère très peu écologique du système, car le minage utilise une énergie considérable. Il y a peut-être encore une trop grande différence entre la philosophie du projet et la réalité de son utilisation.
Ouvrage recensé– Au cœur du Bitcoin, Paris, Éditions First, 2019.
Autres pistes– Jens Helbig, De la blockchain à crypto investisseur : comprendre la technologie Blockchain et investir stratégiquement dans le Bitcoin, l’Ethereum, le Ripple & co, Amazon media.– Nancy Gomez, Patrick Pasin, Géopolitique des cryptomonnaies, Paris, Talma Studios, 2018.– Laurent Leloup, Blockchain, la révolution de la confiance, Paris, Eyrolles, 2017.– Stanislas de Quenetain, Le guide complet pour investir dans les cryptomonnaies et les ICOS, Paris, Mareuil Éditions, coll. « Société », 2019.