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L’Intelligence émotionnelle

de Daniel Goleman

récension rédigée parFrédéric BaquetRédacteur et éditeur indépendant. DEA histoire et civilisations (EHESS).

Synopsis

Développement personnel

L’aptitude psychologique à maîtriser ses émotions est une aptitude maîtresse : elle ouvre la voie aux autres formes d’intelligence, si bien que le QI n’apparaît plus aujourd’hui comme une référence pertinente pour expliquer la réussite sociale et affective. Après avoir décortiqué l’origine des émotions au niveau biologique et la construction de la personnalité émotionnelle au cours de l’existence, Daniel Goleman explique comment les émotions guident nos vies et celles de nos proches. Un savoir indispensable pour développer son intelligence émotionnelle et relever les défis que nous lance en permanence notre destinée.

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1. Introduction

Logées dans notre cerveau primitif, dans le tronc cérébral, les émotions nous accompagnent au quotidien et mettent du sel dans notre vie. Qu’il s’agisse de désir, de tristesse, de peur, de plaisir, d’angoisse ou de colère, elles commandent nos sentiments, mais prennent parfois le pas sur nos pensées conscientes. Elles peuvent alors s’avérer néfastes en nous guidant vers des choix ou des actes inappropriés, et nocifs pour notre santé.

Maîtriser ses émotions s’apprend tout au long de la vie, mais l’enfance est un moment crucial dans le développement de la personnalité émotionnelle. Il est donc essentiel que l’école intègre de nouveaux programmes pour permettre aux enfants et adolescents d’apprendre à reconnaître et maîtriser leurs émotions. Le développement de l’empathie est important dans la réalisation de son potentiel, afin de construire des relations sociales et familiales saines.

2. Les domaines de l’intelligence émotionnelle

Quand on évoque l’intelligence, le premier réflexe est de penser à l’intelligence logico-verbale, mesuré par le QI. Pourtant, l’intelligence se détermine aussi au niveau émotionnel, qui semble être un indice bien plus pertinent de la réussite sociale et affective. À QI égal, les personnes disposant d’une bonne intelligence interpersonnelle réussissent mieux dans leur vie affective ou professionnelle. Le concept d’intelligence émotionnelle est déterminé selon cinq domaines principaux et interdépendants.

La connaissance des émotions ouvre la voie à la conscience de soi et à la sensibilité à ses propres sentiments. Grâce à une attention permanente à son état intérieur, elle permet d’être plus attentif aux émotions, au sens des rêves et des symboles qui manifestent les désirs les plus profonds. Les individus qui en sont dotés ont une bonne intuition et agissent en accord avec leurs sentiments.

La maîtrise des émotions est la capacité à contrôler ses émotions négatives. Elle permet de ne pas se laisser dominer par ses pulsions et d’agir de façon raisonnée et appropriée au contexte. Pour maîtriser les émotions trop envahissantes (colère, tristesse, anxiété), plusieurs méthodes peuvent s’avérer efficaces : les paroles apaisantes favorisent le retour au calme, les distractions (promenade, divertissement) interrompent le train des pensées agressives, l’exercice physique favorise le retour à un état physiologique normal. L’automotivation est la faculté de juguler ses émotions pour se concentrer, se maîtriser et se motiver.

En accaparant l’esprit, les pensées négatives restreignent les capacités cognitives et la faculté à mobiliser sa mémoire pour une tâche donnée. Les émotions sont ainsi capables de limiter notre réussite. À l’inverse, en se laissant porter par l’optimisme, le plaisir et l’enthousiasme, il est possible de mobiliser toutes ses capacités mentales pour penser, résoudre les problèmes ou se fixer des buts lointains (études, apprentissage d’un art). L’automotivation renforce l’efficacité et la productivité.

L’empathie, élément fondamental de l’intelligence interpersonnelle, repose sur la conscience de soi. Être conscient de ses émotions permet de déchiffrer celles des autres. Indispensable dans la vie amoureuse, ce déchiffrage est très souvent inconscient, car 90 % des messages affectifs sont non verbaux. La maîtrise des relations repose sur deux piliers : la maîtrise de soi et l’empathie. Ces composantes en sont la capacité à analyser les situations sociales, à établir des relations personnelles et à négocier des solutions. Elle commande l’aptitude à renvoyer un sentiment approprié à un contexte particulier. Les émotions sont contagieuses, par le biais des signaux psychologiques que nous transmettons aux autres. Une personne de bonne humeur peut ainsi influencer positivement l’humeur de ses relations. L’adresse dont les individus font preuve pour établir une synchronie émotionnelle joue un rôle important dans l’intelligence interpersonnelle.

3. Physiologie des émotions

À l’origine, la fonction des émotions est de mobiliser le corps pour affronter des situations dangereuses ou menaçantes. Elles se traduisent par des modifications physiologiques. La colère accélère le rythme cardiaque, le sang afflue vers les mains et une sécrétion d’adrénaline génère un flux d’énergie brusque et passager nécessaire au combat. La peur provoque un afflux de sang vers les muscles, afin de favoriser la fuite.

L’amour (tendresse, satisfaction sexuelle) occasionne un état général de calme propice à la coopération. La surprise se traduit par un élargissement du champ visuel pour mieux évaluer une situation inattendue, le dégoût par une déformation du visage, qui semble refléter une tentative de fermer les narines ou de recracher un aliment toxique. La tristesse provoque une baisse d’énergie, favorisant le repli sur soi nécessaire pour digérer une perte ou une désillusion.

Le tronc cérébral, qui gouverne les fonctions vitales (respiration, organes). De cette racine ont émergé les centres nerveux sièges des émotions. Leur source la plus ancienne est l’odorat, indispensable pour déterminer les nourritures comestibles ou toxiques. Les premiers mammifères ont ensuite développé le système limbique, qui commande l’amour, la fureur ou l’effroi, réflexes essentiels pour choisir entre la fuite, la lutte ou la coopération. Puis vient Homo sapiens, dont le néocortex, le cerveau pensant qui commande la raison, a permis l’apparition des sentiments spécifiquement humains : abstraction et création artistique. Le néocortex commande notre raison et guide nos choix de vie, mais plus un sentiment est intense, plus l’esprit émotionnel domine, au détriment de l’esprit rationnel. En cas d’urgence émotionnelle, le cerveau limbique reprend le pouvoir.

La partie du cerveau limbique spécialiste des questions émotionnelles, positives comme négatives, est l’amygdale. Son fonctionnement et son interaction avec le néocortex sont au cœur de l’intelligence émotionnelle. Les progrès de l’imagerie médicale (scanner, IRM) ont permis d’identifier les circuits neurobiologiques qui commandent la gestion des émotions. Une partie des informations recueillies par nos sens sont directement transmises à l’amygdale, tandis que les informations complètes sont envoyées, avec un léger temps de retard, vers le néocortex. La réaction émotionnelle précède donc la réaction rationnelle. Un bon fonctionnement des circuits neuronaux entre l’amygdale et le néocortex permet de disposer d’une bonne conscience de ses émotions à un niveau instinctif.

Situés dans le néocortex, les lobes préfrontaux droit et gauche jouent un rôle prépondérant dans la gestion des émotions. Des lésions dans le lobe droit peuvent entraîner une incapacité à déchiffrer et exprimer les sentiments. Des neurones particuliers semblent en effet spécifiquement consacrés à lire les expressions faciales, les postures menaçantes ou de soumission. En ce sens, l’empathie est une donnée biologique. À l’inverse, un bon fonctionnement du lobe préfrontal gauche offre la faculté d’atténuer ses émotions et permet au cerveau rationnel de reprendre le pouvoir.

En toute logique, la physiologie des émotions a une influence importante sur le corps et la santé. Les personnes qui connaissent une anxiété chronique ont deux fois plus de chances de tomber malades. Les hormones libérées en cas de stress (catécholamines, cortisol, etc.) réduisent la résistance immunitaire. La panique et l’angoisse augmentent la tension. La colère, quand elle se transforme en agressivité permanente, élève le rythme cardiaque et la tension, au point d’être un facteur de risque de mort précoce plus important que le tabac ou l’hypertension.

4. L’enfance, moment crucial

L’apprentissage des émotions débute dès la naissance. Jusqu’à l’âge d’un an, les bébés souffrent par empathie avant d’avoir conscience d’eux-mêmes.

À ce stade de leur développement, ils ont besoin de sentir que leurs émotions sont accueillies avec compréhension et bienveillance, dans une bonne harmonisation avec les sentiments de leurs parents, notamment leur mère. Les bébés de mères dépressives manifestent ainsi plus de tristesse et de colère que les bébés de mères non déprimées. À l’âge d’un an environ, ils prennent conscience de leur existence propre et commencent à développer des réactions émotionnelles autonomes.

La façon dont les parents traitent leurs enfants a des conséquences durables sur leur vie émotionnelle. À cette période, les enfants se forgent une idée d’eux-mêmes, apprennent à deviner comment les autres réagissent à leurs sentiments, à exprimer ou non leur ressenti et à définir des stratégies de comportement, qu’elles soient ou non conscientes. Logiquement, les couples les plus intelligents sur le plan émotionnel seront donc les plus à même d’aider leurs enfants à reconnaître leurs émotions, les maîtriser, faire preuve d’empathie, gérer leurs relations avec les autres enfants, avoir confiance en eux.

Trois types d’attitudes peuvent au contraire s’avérer néfastes : ignorer les sentiments de l’enfant, laisser faire en se contentant de récompenser ou de punir, être méprisant et ne pas respecter ses sentiments. Ainsi éduqués, ces enfants risquent d’aborder la vie avec une attitude défaitiste, de développer une mauvaise opinion d’eux-mêmes et d’avoir du mal à identifier leurs sentiments et ceux des autres. Les enfants qui interprètent mal les signes psychologiques obtiennent de moins bons résultats scolaires, rencontrent des difficultés à s’intégrer à des groupes et peuvent être rejetés.

Au cours de l’enfance, filles et garçons apprennent à gérer différemment leurs émotions. Maîtrisant plus tôt le langage parlé, les filles savent mieux exprimer leurs sentiments, contrôler leurs émotions et privilégient les liens affectifs et la coopération, tandis que les garçons sont plus souvent inconscients de leur état affectif et privilégient leur indépendance et la compétition.

Ces différences jouent un rôle essentiel à l’âge adulte au sein des couples. Plus empathiques, les femmes attachent une grande importance à l’expression des sentiments et à la verbalisation des différends, les hommes, qui lisent moins bien les signes non verbaux, ont tendance à se retrancher dans le mutisme et l’indifférence. Or, il semble que plus que les désaccords, ce soit la manière de les gérer qui détermine le succès d’un couple.

La période de l’enfance et de l’adolescence étant à ce point crucial, Goleman prône l’introduction du programme de développement émotionnel SOCS (situation, options, conséquences, solutions) dans les écoles. Dans ce cadre, les enfants apprennent à développer leur conscience affective, à maîtriser leurs émotions, à les utiliser de manière adéquate, à développer leur empathie.

Pour favoriser l’apprentissage de l’intelligence émotionnelle et sociale des enfants, les écoles doivent se transformer en « communauté sociale », afin que les élèves aient le sentiment d’être respectés et d’être liés à leurs camarades et aux professeurs. Afin d’y parvenir, deux changements majeurs doivent être opérés : le dépassement de leurs missions traditionnelles par les professeurs et l’implication de l’ensemble de la communauté scolaire.

5. Apprentissage et bénéfices d’une bonne intelligence émotionnelle

Le niveau d’intelligence émotionnelle dépend du lien qui unit vie affective, personnalité et instincts moraux. Les émotions fonctionnent comme une alarme. L’amygdale disposant d’une mémoire, les situations de stress important et, pire, les traumatismes peuvent abaisser le seuil de réaction à un faible niveau en modifiant les circuits du système limbique.

L’alarme émotionnelle se déclenchera alors de manière intempestive dans une situation présentant des similitudes avec l’expérience d’origine, submergeant la personne et altérant ses pensées rationnelles. Les émotions ne s’oublient pas, mais il est possible d’entraîner le cortex préfrontal à réagir différemment et à freiner les pulsions déclenchées par l’amygdale. En ce sens, « l’apprentissage émotionnel dure toute la vie » (p. 321).

C’est heureux, car l’intelligence émotionnelle offre des possibilités considérables pour le développement de la personnalité, le bien-être et la réalisation de soi. La psychothérapie est une bonne méthode de réapprentissage émotionnel. Dans certains cas, elle peut être aussi efficace qu’un traitement médicamenteux pour abaisser l’activité de l’amygdale. Pour s’exercer, le quotidien est un bon terrain d’expérience. Être attentif à ses pulsions et ses réactions instinctives, à ses modifications physiologiques, apprendre à percevoir les signes renvoyés par les autres de manière positive et non comme des signes d’hostilité, rechercher l’état de calme intérieur, ne pas se placer en victime, privilégier l’écoute et la critique constructive (limiter la critique sur des points précis, éviter les reproches personnels) sont des bons moyens de maîtriser son cerveau limbique.

Par ailleurs, l’espérance, l’optimisme et la pensée positive sont des atouts essentiels à une bonne intelligence émotionnelle. Les personnes optimistes et confiantes en l’avenir savent se motiver et refusent de céder à l’anxiété ou de déprimer lorsqu’elles sont confrontées à des difficultés ou des déconvenues. Elles ne vivent pas les échecs comme une fatalité. Elles font preuve d’« efficacité personnelle », en ce sens qu’elles ont la conviction qu’il est possible de maîtriser le cours de sa vie et de relever les défis qui se présentent. La clé du succès est un talent raisonnable allié à de la ténacité.

Le stade ultime de cette conjonction d’espérance, d’optimisme et de ténacité ouvre la voie au dépassement de soi. Cet état, sorte d’extase appelée « fluidité » par les psychologues, est le summum de l’intelligence émotionnelle. Les émotions sont alors mises au service de la performance ou de l’apprentissage.

À ce stade, les personnes sont dépourvues d’ego, capables d’une concentration extrême et baignent dans une légère euphorie. Les tâches habituelles, même difficiles, sont effectuées sans effort. L’étude de l’état de fluidité a montré que les étudiants qui en étaient capables éprouvaient du plaisir à travailler, car l’étude leur permettait d’atteindre cette sensation 40 % du temps. Cette découverte indique que pousser les enfants vers les domaines qu’ils aiment facilite l’apprentissage et au final la réussite.

6. Conclusion

Contenir ses émotions négatives est la clé du bien-être et de la réussite sociale. Les personnes rencontrant des difficultés à s’exprimer ou à déchiffrer leurs émotions se sentent souvent frustrées, dominées par leurs sentiments, manquent d’empathie et rencontrent des difficultés au niveau relationnel. Un trop-plein d’émotions entraîne une mobilisation permanente de l’esprit et nuit aux capacités cognitives et affectives. Si un traitement médical chimique permet d’atténuer les cycles maniaques ou les dépressions paralysantes, aucun traitement ne peut juguler les émotions ordinaires.

Si chacun d’entre nous doit apprendre à maîtriser ses pulsions pour favoriser son accomplissement et des relations harmonieuses, l’enfance est le moment idoine pour susciter le développement de l’intelligence émotionnelle. Il est donc indispensable que des efforts importants soient entrepris pour repenser le modèle de l’éducation au sein de nos sociétés modernes.

7. Zone critique

L’Intelligence émotionnelle est un ouvrage qui a fait date dans le monde de la psychologie. Best-seller, il a été traduit dans plus de 40 langues et vendu à plus de cinq millions d’exemplaires dans le monde.

En synthétisant des centaines d’études scientifiques, il a permis de remettre en cause le sacro-saint QI comme référence unique de l’intelligence et révéler le rôle essentiel joué par nos émotions dans nos choix conscients et inconscients.

Daniel Goleman a cependant une propension à tout percevoir par le prisme des émotions et l’influence du milieu culturel et de l’origine sociale sur la construction de la personnalité n’est que très peu prise en compte dans sa réflexion. Il n’en reste pas moins que son travail offre aux personnes dominées par leurs instincts une matière considérable pour réfléchir à leur comportement, ainsi que de nombreuses pistes de travail pour progresser dans la maîtrise de leurs émotions et leur épanouissement professionnel.

8. Pour aller plus loin

Ouvrage recensé

– L’Intelligence émotionnelle, tome 1 : cultiver ses émotions pour développer une intelligence nouvelle, Paris, J’ai lu, 2018 [1997].

Du même auteur

– L’Intelligence émotionnelle, tome 2 : cultiver ses émotions pour s’épanouir dans son travail, Paris, Robert Laffont, 1999.

Autre pistes

– Christophe André, Imparfaits, libres et heureux, Paris, Odile Jacob, « Poches psychologie », 2009.– Ilios Kotsou, Intelligence émotionnelle et management, Bruxelles, De Boeck, 2016 (3e éd.).– Gilles Corcos et Corinne Vilder, Comment cultiver son intelligence émotionnelle, Paris, Larousse, « Poche », 2016.

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