dygest_logo

Téléchargez l'application pour avoir accès à des centaines de résumés de livres.

google_play_download_badgeapple_store_download_badge

Bienvenue sur Dygest

Dygest vous propose des résumés selectionnés et vulgarisés par la communauté universitaire.
Voici le résumé de l'un d'entre eux.

Pourquoi nous dormons

de Dr. Matthew Walker

récension rédigée parEstelle Deniaud BoüetDocteure en pharmacie (Université de Nantes).

Synopsis

Science et environnement

Cet ouvrage nous plonge dans un univers à la fois familier et mystérieux, le sommeil. L’auteur relate toutes les expériences scientifiques, qui ont permis aux chercheurs depuis quelques dizaines d’années de découvrir ce qu’était le sommeil, à quoi il sert, ce qu’il s’y passe et quels en sont les bienfaits. Il met en avant toutes ses vertus sur la santé, mais aussi sur la vie personnelle ou professionnelle. Il dénonce également le manque chronique de sommeil comme un mal de notre société moderne.

google_play_download_badge

1. Introduction

Le sommeil fait partie du quotidien de chacun d’entre nous, et pourtant que savons-nous vraiment du sommeil ? De l’Interprétation des rêves de Freud à la vision moderne que le sommeil n’est qu’une perte de temps, que cache réellement ce laps de temps où nos paupières sont baissées ? Et que faire face aux troubles du sommeil, comme l’insomnie, devenue presque une banalité pour de nombreuses personnes ?

Pourquoi nous dormons est un recueil de toutes les découvertes scientifiques sur le sommeil depuis quelques dizaines d’années. Une mine d’informations, mais aussi de révélations, sur ce que nous devrions tous savoir sur le sommeil.

2. Qu’est-ce que le sommeil ?

Le sommeil, nous en faisons tous l’expérience chaque jour, et, chaque matin, nous sommes en mesure de dire si nous avons bien ou mal dormi. De plus, nous sommes tous capables de reconnaître instinctivement une personne qui dort. Pourtant, le sommeil est loin d’être une évidence sur le plan scientifique. « Aussi étonnant que cela puisse paraître, jusqu’à très récemment, les médecins et scientifiques n’étaient pas en mesure d’expliquer le sommeil de façon cohérente et raisonnée » (p. 11).

Les scientifiques ne parviennent à décrypter les secrets du sommeil que depuis quelques décennies, grâce aux progrès de l’imagerie médicale et à la polysomnographie, un test spécifique du sommeil, qui mesure en parallèle l’activité des ondes cérébrales, les mouvements des yeux et l’activité musculaire. Les études ont permis de différencier deux grands types de sommeil : le sommeil REM ou sommeil paradoxal, caractérisé par les rêves et des mouvements rapides des yeux, et le sommeil NREM, lui-même divisé en quatre phases de profondeur variable. Les différents types de sommeil alternent régulièrement au cours de la nuit, mais dans des proportions variables. Ainsi, en cas de réveil précoce, le risque est important de manquer de sommeil REM, tandis qu’en cas de coucher tardif, le sommeil NREM peut faire défaut.

Le sommeil est une constante biologique universelle, qui a résisté à toutes les évolutions depuis l’arrivée de la vie sur Terre. En effet, toutes les espèces animales connues à ce jour présentent une forme ou une autre de sommeil. Quelles sont les fonctions des différents types de sommeil ? Toutes les phases de sommeil sont nécessaires, car elles assurent des fonctions cérébrales essentielles. Le sommeil NREM joue un rôle capital dans la mémorisation, en mobilisant de grandes quantités d’informations pour les acheminer vers différentes zones de stockage dans le cerveau.

Le sommeil REM s’avère essentiel pour intégrer toutes les données accumulées par le cerveau et créer de nouvelles associations d’idées. C’est également le sommeil des rêves, pendant lequel nous n’avons plus aucun tonus musculaire. « Le cerveau paralyse le corps pour que l’esprit puisse rêver en toute sécurité » (p. 61).

3. Le sommeil, un besoin biologique

Le sommeil, en termes de besoin et de qualité, est une fonction déterminée par trois facteurs principaux, qui sont le rythme circadien (l’horloge biologique interne, indiquant l’alternance du jour et de la nuit), la sécrétion de mélatonine, également appelée l’hormone de l’obscurité, et le taux d’adénosine dans le cerveau. Le rythme circadien d’un adulte est d’un peu plus de 24 heures, et il connaît des fluctuations au cours de la croissance et en fonction des individus. « Cette horloge microscopique est le chef d’orchestre suprême de la symphonie biologique du rythme de la vie » (p. 24).

La mélatonine ne commande pas le sommeil, mais précise à l’organisme quand il fait noir, c’est-à-dire à quel moment il est temps d’aller dormir. Tout au long de la phase d’éveil, le taux cérébral d’adénosine augmente, ce qui provoque le besoin de sommeil. Le sommeil permet de remettre à zéro le compteur de l’adénosine.

Toutes les espèces animales doivent dormir, même si elles ne dorment pas toutes du même sommeil. Le sommeil NREM serait la première forme de sommeil apparue dans l’évolution, alors que le sommeil REM ne serait réservé qu’aux oiseaux et à la majorité des mammifères. Certains animaux sont capables de ne dormir que d’un seul hémisphère cérébral, pour rester en éveil de l’autre hémisphère. Par ailleurs, le sommeil évolue au cours de la vie. La quantité et la qualité du sommeil changent profondément de la vie in utero jusqu’à l’âge adulte, et de l’âge adulte jusqu’à la fin de la vie.

Certains changements seraient dictés par le développement cérébral, en particulier chez le fœtus, le jeune enfant ou encore l’adolescent. Le sommeil à l’adolescence serait notamment capital pour prévenir un grand nombre de troubles psychiatriques, comme la schizophrénie, les troubles bipolaires, la dépression majeure ou les troubles de l’attention avec ou sans hyperactivité.

Besoin vital, le sommeil est « un véritable couteau suisse pour la santé et le bien-être » (p. 16). Ses bienfaits sont de mieux en mieux connus et ne se limitent pas seulement aux fonctions cérébrales. Il est capital pour l’apprentissage et la mémoire, pour le tri des informations importantes à retenir, pour l’amélioration des fonctions motrices, même en l’absence de pratiques, ou encore la créativité. De plus, il est indispensable pour le bon fonctionnement de l’organisme, comme en témoignent toutes les conséquences sur la santé du manque de sommeil.

4. Pourquoi rêvons-nous ?

Au cours de la phase de sommeil REM, surviennent les rêves, une période très particulière du sommeil. Pendant les rêves, certaines structures cérébrales s’éteignent, tandis que d’autres, très profondes et le plus souvent indécelables, s’allument. Les chercheurs se sont longtemps interrogés sur l’utilité des rêves. Grâce aux études les plus récentes, ils sont désormais capables de démontrer que les rêves ont une double utilité.

Les rêves constituent en quelque sorte une thérapie nocturne, destinée à nous aider à contrôler nos émotions, et en particulier les émotions négatives. C’est le seul moment de la journée, où le taux de noradrénaline, une hormone du stress, est nul. Grâce aux rêves, nous sommes capables d’analyser nos propres émotions et les émotions d’autrui. Ils sont donc essentiels pour la vie sociale. La seconde fonction des rêves est la créativité et la résolution de problèmes.

Durant les rêves, le cerveau teste de nombreuses associations d’informations et de pensées pour découvrir de nouveaux chemins. De nombreuses découvertes et créations artistiques seraient nées au cours des rêves de leurs auteurs. « Le sommeil REM permet à votre cerveau de dépasser le stade de l’apprentissage pour atteindre la pleine compréhension » (p. 236).

Aujourd’hui, grâce aux techniques d’imagerie les plus récentes, les scientifiques sont presque capables de déterminer de quoi rêvent les individus. Et il s’avère que le contenu des rêves est plus important que le fait même de rêver. Rêver d’un problème à résoudre augmente considérablement les chances d’être capable de trouver une solution au réveil. Pour les personnes atteintes de stress post-traumatique, le décryptage des rêves pourrait permettre de réduire les cauchemars répétitifs. Certains chercheurs s’intéressent également de près aux potentialités thérapeutiques des rêves lucides, c’est-à-dire lorsqu’une personne qui rêve devient capable de prendre le contrôle de son rêve.

5. Les conséquences insoupçonnées du manque de sommeil

Si le sommeil apparaît indispensable pour la santé, quelles sont les conséquences du manque de sommeil ? L’auteur insiste tout au long de l’ouvrage sur les effets néfastes du manque de sommeil, ne serait-ce qu’une ou deux heures en moins chaque nuit de manière répétée. « Aucun aspect du corps humain n’est épargné par le mal incommodant et toxique que provoque le manque de sommeil » (p. 141). Les premiers effets auxquels nous pensons tous concernent le cerveau, avec des problèmes d’attention, de mémoire, une irritabilité et des risques importants de somnolence.

Mais le manque de sommeil peut impacter négativement tous les organes et toutes les fonctions de l’organisme. Il pourrait contribuer au développement de maladies psychiatriques. « Aucune maladie psychiatrique majeure ne montre un sommeil normal » (p. 158). Il provoque une destruction du système immunitaire, il majore le risque de développer une maladie d’Alzheimer, un diabète de type 2, un cancer ou des problèmes cardiovasculaires, il augmente l’appétit et favorise donc la prise de poids et l’obésité. Il peut également altérer la fertilité, chez les hommes comme chez les femmes et il serait même capable d’endommager l’ADN, le matériel génétique de nos cellules. Pour s’exposer à tous ces problèmes de santé, inutile d’être un insomniaque chronique, un manque de sommeil sur quelques nuits peut suffire à provoquer des effets négatifs, car le cerveau est incapable de récupérer le sommeil perdu.

Toutes les études scientifiques menées sur le sujet le confirment, le manque de sommeil est dangereux pour la santé. Mais il peut aussi être mortel. Tout d’abord, les conséquences négatives du manque de sommeil peuvent réduire l’espérance de vie et donc contribuer à la mortalité. Ensuite, il existe une maladie rare et mortelle, l’insomnie fatale familiale. Débutant vers l’âge de 40 ans, cette maladie génétique entraîne une insomnie, puis des troubles cognitifs et une détérioration de l’état de santé. Au bout de quelques mois, le sujet décède, dans un état de démence sénile. Aucun traitement n’existe à ce jour contre cette maladie, à laquelle aucun patient n’a survécu plus de dix mois.

Si l’ensemble de la population peut être confronté au manque de sommeil et à ses effets néfastes sur la santé, les personnes les plus touchées sont celles atteintes d’un trouble du sommeil. Actuellement, plus d’une centaine de troubles du sommeil, plus ou moins graves, ont été décrits par les spécialistes. Avec les syndromes d’apnée du sommeil, le plus fréquent est l’insomnie. Selon l’auteur, l’insomnie implique de nombreux dysfonctionnements de l’organisme, à la fois pendant la journée et la nuit, ce qui explique pour lui l’inefficacité des somnifères, qui n’agissent que sur une partie du cerveau. De plus, ces médicaments induisent un sommeil artificiel, bien loin du sommeil naturel dont nous avons besoin.

6. La place du sommeil dans la société moderne

En dehors des troubles du sommeil, un grand nombre de personnes présentent un déficit chronique de sommeil. « Dans tous les pays développés, deux tiers des adultes ne réussissent pas à atteindre les huit heures de sommeil recommandées par nuit » (p. 9). Selon l’auteur, cette situation serait étroitement liée à notre mode de vie moderne, l’obligation de se lever tôt, l’impossibilité de faire une sieste et un coucher de plus en plus tardif. Conscient de la gravité de ce phénomène, l’Organisation mondiale de la Santé reconnaît d’ailleurs le manque de sommeil comme une menace sanitaire mondiale.

Quoi que certains en disent, le temps de sommeil recommandé pour un adulte est de 7 à 9 heures par nuit. Seul un petit nombre d’individus serait capable de dormir moins, sans dommage pour leur santé. Or nombreux sont ceux qui se vantent, à tort, d’être capables de ne dormir que 4 à 5 heures par nuit ! Dans notre vie moderne, plusieurs facteurs détériorent notre besoin naturel de sommeil, la lumière électrique constante, et en particulier la lumière LED qui perturbe le rythme circadien, la température régularisée, la prise de caféine qui interfère avec le taux d’adénosine, la consommation d’alcool « l’un des suppresseurs de sommeil REM les plus puissants que nous connaissions » (p. 90), mais aussi les contraintes scolaires et professionnelles.

Selon l’auteur, il est urgent et nécessaire de redonner au sommeil une place centrale dans les messages de prévention et d’éducation à la santé. Différentes actions, individuelles ou collectives, sont possibles pour permettre à chacun de dormir en quantité suffisante et d’un sommeil de qualité. Individuellement, il conseille d’adopter une hygiène du sommeil.

Sur le plan collectif, l’aménagement des horaires de cours ou de travail, ou encore la possibilité de faire une sieste, sont des pistes intéressantes pour lutter contre le déficit chronique de sommeil, qui ne peut pas se rattraper au cours du week-end. « Certains scientifiques, dont je fais partie, font désormais pression sur les médecins pour qu’ils prescrivent du sommeil » (p. 10). L’auteur plébiscite ainsi un retour au besoin essentiel de dormir, tout simplement pour être en meilleure santé.

7. Conclusion

Il y a quelques dizaines d’années, le sommeil restait l’une des dernières grandes énigmes scientifiques. Depuis, grâce aux progrès technologiques, les chercheurs ont pu comprendre ce qu’est le sommeil, ce qu’il s’y passe et surtout à quel point il est essentiel pour la santé. Le sommeil, au moins autant que l’éveil, conditionne nos performances, notre état de santé, notre capacité à évoluer dans la société et dans le monde. À l’inverse, le manque de sommeil apparaît associé à toutes les formes d’état pathologique que la médecine connaît à ce jour, de l’infection la plus bénigne au cancer le plus avancé.

Dormir serait donc aussi capital que respirer ou manger. Pourtant, le sommeil est souvent dénigré dans notre société moderne. Rien n’est fait pour le favoriser. Au contraire, tout est fait pour le déstabiliser. Les solutions pour remettre le sommeil à sa place peuvent être multiples, individuelles ou collectives. En tout cas, l’auteur les considère plus que jamais comme prioritaires pour préserver la santé humaine.

8. Zone critique

Pourquoi nous dormons est un ouvrage grand public, écrit par un scientifique. En tant que tel, il aborde chaque question en s’appuyant sur les dernières données publiées par les experts du monde entier. Une grande partie des découvertes décrites dans cet ouvrage sont fondées sur des expériences qui ont été approuvées par l’ensemble de la communauté scientifique. Pour autant, tous les sujets abordés dans ce livre ne font pas l’unanimité. Certaines questions n’ont pas encore trouvé de réponses, et l’auteur émet alors ses hypothèses personnelles, qu’il voudrait tester lors d’études.

D’autres experts peuvent formuler d’autres hypothèses, qui seront-elles aussi à tester. L’auteur propose également différentes actions individuelles ou collectives à mettre en place pour lutter contre le manque de sommeil. Mais tous les spécialistes de la santé ne placent pas le sommeil au cœur de leurs préoccupations. De plus, contrairement à l’auteur, certains spécialistes du sommeil défendent vaillamment le recours aux médicaments comme les somnifères. D’autres prônent le bannissement de toute nouvelle technologie, pour un retour vers un sommeil ancestral.

9. Pour aller plus loin

Ouvrage recensé

– Pourquoi nous dormons, le pouvoir du sommeil et des rêves, Paris, Éditions La Découverte, 2018.

Autre piste

– Sylvie Royant-Parola, Quoi de neuf sur le sommeil ? Bien dormir pour mieux se porter au quotidien, Versailles, éditions Quaes, 2018.

© 2021, Dygest