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Émile Durkheim

Le Suicide

"Le Suicide" d'Émile Durkheim, publié en 1897, est un ouvrage fondateur de la sociologie qui analyse le suicide comme un fait social plutôt que comme une série d'actes individuels isolés. Durkheim utilise des données statistiques pour démontrer que le suicide est influencé par des facteurs sociaux et varie selon le degré d'intégration et de régulation des individus au sein de leur société. Bien des aspects du texte de Durkheim ont été critiqués. Plusieurs de ses analyses sont aujourd’hui datées. La thèse de ce livre est pourtant l’expression d’une démarche intellectuelle toujours au fondement de la réflexion sociologique. S’il est sobrement sous-titré « Étude de sociologie », il faut lire Le Suicide comme le remarquable manifeste d’une discipline alors en formation. Autrement dit, comme une véritable « défense et illustration » des règles de la méthode sociologique.

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SĂ©bastien ZĂ©rilli

Le Suicide
Le Suicide

book.chapter L’œuvre d’un fondateur

On doit effectivement à Émile Durkheim d’avoir énoncé Les Règles de la méthode sociologique, comme l’indique le titre d’un ouvrage éponyme qu’il signe en 1895. La sociologie « a un objet nettement défini et une méthode pour l’étudier. L’objet, ce sont les faits sociaux ; la méthode c’est l’observation et l’expérimentation indirecte, en d’autres termes, la méthode comparative » professe le savant. Si la sociologie doit se développer en tant que discipline particulière, c’est parce que les « faits sociaux » auxquels elle s’intéresse sont d’une nature spécifique, ajoute-t-il. Ils sont l’expression impersonnelle, mais efficace, du fonctionnement des sociétés. « [P]our qu’une véritable sociologie puisse exister, il est nécessaire que se produisent dans chaque société des phénomènes dont cette société soit la cause spécifique et qui n’existeraient pas si elle n’existait pas, et qui ne sont ce qu’ils sont que parce qu’elle est constituée comme elle l’est » précise le sociologue dans l’article « La sociologie et son domaine scientifique ». La société est un tout différent de la somme des individus qui la composent. Elle a une existence spécifique, en partie détachée de celle de ses membres. Elle est un être d’un genre particulier, « sui generis », selon la terminologie durkheimienne. Puisque la « conscience collective » des sociétés ne saurait se ramener à l’addition d’une multitude de consciences individuelles alors, la réflexion sociologique ne saurait se rabattre sur les principes de la psychologie. « Il est bien vrai que la société ne comprend pas d’autres forces agissantes que celles des individus, remarque le sociologue dans Le Suicide ; seulement les individus, en s’unissant, forment un être psychique d’une espèce nouvelle qui, par conséquent, à sa manière propre de penser et de sentir ». Les faits sociaux ont pour Durkheim une spécificité : ils s’imposent extérieurement à la masse des individus. Parce qu’ils sont l’expression de la conscience collective, les principes du droit, tout comme les règles de la morale ou encore les façons de parler, ont effectivement en commun d’exercer une pression sociale sur chacun des membres d’une collectivité. Sans doute une condamnation pénale n’a-t-elle pas la même force qu’une remarque générée par une faute de français, ou qu’une réprimande formulée après un acte d’impolitesse. Chacun de ces rappels à l’ordre prouve que la société nous intime de respecter, avec une force variable, ses normes et ses interdits. D’ailleurs, c’est parce qu’ils s’imposent généralement et extérieurement aux individus que le sociologue doit considérer « les faits sociaux comme des choses » précise Durkheim. L’ensemble des croyances, des valeurs et des représentations qu’incarne et que diffuse, à travers ses membres, une société fonde ce que le sociologue appelle sa « constitution » ou son « assiette » morale. Celle-ci est liée à un « substrat social », c’est-à-dire à une organisation sociale spécifique. En saisissant les changements conjoints de la structure sociale et de la conscience collective des sociétés, Durkheim, dans la droite ligne de penseurs comme Saint-Simon (1760-1825) ou Auguste Comte (1798-1857), détermine ainsi une sorte de loi caractérisant leur évolution. Dans De la division du travail social, il étudie ainsi le passage des sociétés traditionnelles aux sociétés modernes en observant l’effacement d’une « solidarité mécanique » et l’apparition d’une « solidarité organique ». La solidarité mécanique distingue des groupements dans lesquels la cohésion sociale et la pression du collectif sur l’individu sont très fortes. Les membres de ces sociétés sont identiques et en quelque sorte interchangeables. Une « solidarité par similitude » les relie. La solidarité organique, typique des sociétés occidentales transformées par la révolution industrielle du XIXe siècle, définit des systèmes sociaux dans lesquels les individus, tout en étant plus libres, plus détachés du groupe, sont en même temps plus dépendants les uns des autres.

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