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George L. Mosse

Les racines intellectuelles du Troisième Reich

La Shoah perpétrée par les nazis apparaît comme un événement unique dans l’histoire. Animés d’une idéologie jusqu’au-boutiste dans la perpétration concrète de l’inimaginable, tout porte à croire, de prime abord, que le triomphe et que la mise en œuvre de leur vision du monde ont constitué une anomalie ou un accident historiques sorti de nulle part. Pourtant, nombre d’idées parmi les plus significatives et les plus inquiétantes étaient déjà largement ancrées au cœur de la société allemande au moment où Hitler accédait au pouvoir. En effet, l’idéal du « Volk », soit celui d’une nation allemande unique en son genre et dans sa destinée, avait déjà très profondément jalonné et marqué l’esprit d’une Allemagne irrépressiblement tourmentée depuis le XIXe siècle.

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Axel Klioua

Les racines intellectuelles du Troisième Reich
Les racines intellectuelles du Troisième Reich

book.chapter Introduction : les origines de la crise idéologique allemande

Contrairement à de grands États comme la France ou l’Angleterre, l’unité de l’État allemand s’est opérée tardivement. Et c’est cette « longue quête de l’Allemagne en vue de l’unité nationale » qui « eut pour effet d’attirer l’attention de ses meilleurs esprits vers les problèmes de destin national » (p.40). De fait, si l’unité aurait théoriquement pu être amorcée après le Congrès de Vienne et la chute de Napoléon en 1815, les espoirs ont régulièrement été déçus, même après que Bismarck eût proclamé le roi de Prusse empereur en 1871, au lendemain de sa victoire dans la guerre franco-prussienne. Et pour cause, de 1815 à 1871, ce ne fut qu’« une Confédération allemande peu structurée qui émergea, laissant les différents États allemands poursuivre chacun leur voie ». En conséquence, au fil du temps, « les Allemands qui aspiraient à l’unité se tournèrent de plus en plus vers la formation d’une cohésion culturelle au sein de la population, plutôt que vers une unité politique qui apparaissait si lointaine » (p.41). Cette tendance fut d’autant plus manifeste qu’entre-temps, après le nouvel échec et les frustrations de 1848, cette « unité culturelle » devait être toujours plus radicalement conçue « en termes de racines nationales et d’opposition à l’étranger », parallèlement à « une opposition croissante à la modernité » (p.40-41). Certes, en 1871, la création du Reich par Bismarck fut accueillie avec un enthousiasme considérable. « Mais pour bon nombre d’Allemands, l’unité politique ne suffisait pas. Durant la longue période de déception, ils avaient appris à penser en termes culturels, et cette habitude de pensée perdura » (p.255. Chez de très nombreux penseurs germains comme pour le modeste citoyen allemand, cette « attente de l’unité avait pris des dimensions quasi messianiques ». Or, plus cette attente était frustrée par la décevante réalité du présent, plus la tendance à puiser dans un passé idéalisé l’espoir d’un avenir meilleur grandissait. Comme le résume George L. Mosse, « le monde moderne avait dénié aux Allemands l’unité dont ils avaient autrefois bénéficié, et nombre d’entre eux avaient le sentiment que le mouvement en faveur de l’unité devait puiser sa force dans cette époque lointaine plutôt que dans un présent peu prometteur » (p. 41).

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