Dygest vous propose des résumés selectionnés et vulgarisés par la communauté universitaire.
Voici le résumé de l'un d'entre eux.
de Jane Nelsen
Pour la première fois publié en 1981, cet ouvrage est un succès de librairie vendu à travers le monde à plus d’un million d’exemplaires. La Discipline Positive, inventée par l'autrice et sa collègue Lynn Lott, se base sur les principes du psychiatre autrichien, Alfred Adler, afin de proposer un modèle mêlant fermeté et bienveillance. C’est une approche qui encourage l’enfant à développer ses compétences sociales dans un esprit de respect mutuel au sein des familles, des écoles et des communautés.
Après des siècles où la place des enfants n’avait pas d’importance, où ils n’étaient ni respectés ni écoutés, Jane Nelsen rompt avec les traditions patriarcales pour inventer une méthode alternative répondant par là-même aux désirs des parents de vivre en harmonie avec leur famille et répondant aussi à une société qui évolue. La Discipline positive est un ouvrage de Jane Nelsen publié en 1981 et revisité au fil des décennies.
Découragée par ses propres méthodes, l’auteure en crée une fondée sur l'encouragement qui donne à l’enfant le sentiment de participer et de se sentir connecté aux autres, ce qui l’aide à s’engager au mieux dans ses apprentissages académiques et sociaux. Ce livre se veut être un guide pour les parents désemparés devant les comportements déstabilisants des enfants.
La Discipline Positive trouve ses origines chez le médecin et psychothérapeute Adolphe Adler (1870-1937) et chez le psychiatre Rudolf Dreikurs (1897-1972). Le premier, fondateur de la psychologie individuelle, était un défenseur de l’égalité entre les générations, les sexes et les peuples.
Le second a développé la psychologie adlérienne et écrit de nombreux ouvrages pour aider parents et enseignants à mieux comprendre leurs enfants. Voici les principes d’Adler : les enfants sont des êtres sociaux ; leur comportement vise à atteindre un but même s’ils n’en ont pas conscience ; appartenir à un groupe une famille et avoir de l’importance est un besoin essentiel pour l’être humain ; un enfant qui se comporte mal est un enfant découragé ; avoir le sens de la responsabilité sociale et le sens de la communauté ; le principe d’égalité, fondement de la coopération : tout le monde a le droit à la dignité et au respect. Un autre élément à retenir est que pour Dreikurs, les enfants perçoivent bien mais interprètent mal.
Trois modèles d’éducation sont possibles : le modèle autoritaire (contrôle excessif), le modèle permissif, et la Discipline Positive. Si les punitions fonctionnent souvent dans l’immédiat, à long terme elles n’entraînent plutôt que rancœur, revanche, rébellion et dissimulation.
À contrario, la Discipline Positive permet d’obtenir des résultats sur le long terme et de développer chez l’enfant autonomie et coopération. : elle n’engendre ni sévérité ni permissivité. Cette dernière, quant à elle, entraîne la codépendance. Notons également que les systèmes très répandus des « récompenses-punitions » et le « trop de contrôle » n’apprennent pas aux enfants le sens des responsabilités. Il s’agit de bienveillance et de fermeté, mais également de respect mutuel et de coopération.
« La Discipline Positive est centrée sur l’importance d’établir le lien (de connecter) avant de corriger (à comprendre dans le sens d’ « enseigner »), et sur la nécessité d’impliquer les enfants dans la recherche de solutions plutôt que de punir leurs erreurs. »
Jane Nelsen a fondé La Discipline Positive selon 5 critères :
– Une discipline à la fois ferme et bienveillante (respectueuse et encourageante) ;– Une discipline aidant les enfants à développer un sentiment d’appartenance et d’importance (être en lien) ;– Une discipline enseignant des compétences sociales et favorisant le développement de personnalités tout en agissant avec respect, intérêt pour les autres, responsabilité et coopération ;– Une discipline invitant les enfants à avoir confiance en leurs capacités et à se servir de leur potentiel personnel de manière constructive.
• Le temps : un allié de grande importanceAvant de se lancer vers cette Discipline Positive, les adultes doivent absolument garder en tête que « la situation se dégrade souvent avant de s’améliorer, puisque les enfants testent un jour ou l’autre le système mis en place. Il est difficile mais salutaire de rester ferme et bienveillant pendant cette période de test » (p.181). Pour résumer, le temps est un allié : il est nécessaire pour que les choses se mettent en place ! Il ne faut surtout pas baisser les bras au premier échec.
Pour Rudolf Dreikurs, il existe 4 objectifs-mirages qui reposent sur des croyances erronées et vers lesquelles nombre d’enfants (et d’adultes) tendent : accaparer l’attention ; prendre le pouvoir ; prendre une revanche ; confirmer sa croyance d’incapacité. Pour palier cela, il s’agit d’être sensible au véritable message que l’enfant veut transmettre et pour cela prendre le temps de se mettre à sa place. Pour avancer vers une Discipline Positive, il est indispensable de poser un nouveau regard sur ces comportements. Voici quelques clefs : s’ouvrir à une responsabilité partagée sans culpabilité ; mieux comprendre la nature du comportement inapproprié ; regarder les comportements inappropriés comme des opportunités d’apprentissage.
• La bienveillance et la fermetéLa bienveillance et la fermeté font partie des concepts fondateurs de la Discipline Positive. La bienveillance permet le respect de l’enfant, la fermeté celui de l’adulte, mais attention « la bienveillance ne signifie pas céder aux demandes des enfants, les protéger des frustrations, voler systématiquement à leur secours, les gâter avec excès, intervenir à chaque instant. Ces comportements relèvent de la permissivité » (p.39).
Là où la méthode autoritaire manque de bienveillance, la méthode permissive manque de fermeté. Comment allier les deux ? La bienveillance consiste à être attentif à leurs émotions (ex. : Je vois que que tu es déçu, en colère, contrarié…), à leur faire confiance pour surmonter une déception ce qui développe le sentiment d’être capable. Jane Nelsen donne l’exemple d’un enfant insolent. Pour elle, la meilleure façon de faire est de quitter la pièce et d’en reparler plus tard : lui faire comprendre qu’on respecte sa colère mais pas la manière dont il la gère ! Un problème ne se gère pas dans l’immédiat, à chaud : la solution est de prendre le temps que les choses retombent et se calment afin d’éviter que les mots dépassent la pensée. Dans la fermeté, il y a la notion du respect des limites permettant l’acquisition des compétences sociales dans un cadre sécurisant et contenant.
• Le droit à l’erreur et l’encouragementLa société tolère mal l’erreur. Depuis la petite enfance, les individus sont poussés à être parfaits. Dreikurs, quant à lui, évoque « le courage d’être imparfait », et c’est bien cela qu’il faut enseigner aux enfants. L’un des thèmes omniprésent de la Discipline Positive est que l’adulte doit encourager l’enfant à porter un regard différent sur ses erreurs. Ces dernières doivent en effet devenir des opportunités d’apprentissage. L’adulte doit encourager l’enfant à réparer ses erreurs, à s’autoévaluer et à devenir autonome. Pour rediriger l’enfant vers des comportements plus constructifs, l’encouragement est nécessaire, car il aide au développement de la confiance en soi : « un enfant encouragé est un enfant qui pense : Je suis capable, je peux participer, je peux avoir de l’influence sur ce qui m’arrive et sur la manière de réagir à ce qui m’arrive » (p.214).
En réalité, il est important d’atteindre le cœur avant d’atteindre la tête. Se centrer sur les forces et non sur les faiblesses est également primordial, car « si on passe 85 % de son temps et de son énergie à se concentrer sur les 15 % qui ne vont pas, c’est la part négative qui devient peu à peu envahissante, et qui finit par occulter complètement la part positive, les ressources » (p.233).
Remarquer les améliorations, ne pas attendre la perfection, respecter le temps des apprentissages sont primordiaux pour que l’enfant se sente encouragé. Jane Nelsen insiste également sur le temps dédié (moments exclusifs avec un enfant) : c’est en effet un moyen d’encouragement, car c’est « une bulle d’amour inconditionnel, d’attention exclusive, de présence à l’autre, un bonheur partagé » (p.220).
Les questions de curiosité invitent l’enfant à découvrir les conséquences de ses choix. « Le rôle de l’adulte passe alors du dire au questionnement à travers des questions de curiosité. Entendons par là des questions qui témoignent d’une réelle envie de comprendre et qui font avancer. »
Pour l'autrice, nous avons trop l’habitude d’être dans le dire au détriment du questionnement. Un exemple, au lieu de dire « Va te brosser les dents », on dira « Qu’est-ce que tu dois faire pour avoir les dents propres ? »
Pour éviter les discours, les questions de curiosité sont un moyen très utile pour impliquer les enfants : Que s’est-il passé ? Comment penses-tu résoudre le problème ? Qu’as-tu appris qui pourra t’aider la prochaine fois ?
Jane Nelsen propose également de fabriquer une roue des choix utilisée en école primaire. Ce support visuel ludique propose différentes solutions pour gérer un conflit : demander de l’aider ; ignorer ; inscrire à l’ordre du jour ; se comporter comme un ami ; dire ce que l’on voudrait ; partager et attendre son tour… Les parents comme les enseignants peuvent créer avec leurs enfants et leurs élèves une roue des choix personnalisée.
Pour Alfred Adler, les quatre étapes pour gagner la coopération des enfants sont les suivantes : montrer que l’on comprend ses émotions en lui posant des questions et en reformulant ses ressentis ; faire preuve d’empathie ; partager nos perceptions et ressentis ; inviter l’enfant à se centrer sur une solution. Pour développer cette coopération, voici quelques idées de phrases alliant fermeté et bienveillance : « Je termine ce que je suis en train de faire et je suis à toi ; Je sais que tu es capable de dire ça de façon respectueuse ; Je t’aime et je vais attendre qu’on puisse reprendre cette conversation de façon respectueuse ; Je sais que tu peux trouver une solution qui nous aidera ; On en parlera plus tard, parce que maintenant, il est temps de (par exemple : monter dans la voiture) » (p.44).
L’auteur invite parents et enfants à penser ensemble aux limites qu’il faut établir (temps devant les écrans, jeux extérieurs, devoirs, heure du coucher…) : « lorsque les enfants sont impliqués dans le “comment” et ont des choix, ils se sentent très vite en situation de capacité, entraînés vers la coopération (…) Plus les enfants participent à la mise en place de limites fondées sur leurs besoins, une bonne compréhension de la situation et le sens de leurs responsabilités, plus ils sont disposés à les respecter » (p.43).
« Le Temps d’Échange en Famille est une opportunité régulière et planifiée d’environ 15 à 30 minutes par semaine pour apprendre à s’apprécier de façon positive, à se concentrer ensemble sur les solutions qui faciliteront le plaisir de vivre ensemble, et à développer les compétences sociales nécessaires au plein épanouissement de chacun » (p. 258).
Les objectifs sont de s’apprécier, se remercier, se faire des compliments, s’aider, résoudre les problèmes et trouver des solutions, et tout simplement se faire plaisir et planifier des sorties et événements avec pour bénéfices le développement du sentiment d’appartenance et d’importance, la création d’une atmosphère familiale axée sur la coopération ; l’expression de la gratitude ; la diminution de la fréquence des incidents…
Il en est de même pour la classe (à faire tous les jours ou 3 fois par semaine en primaire, une fois par semaine au collège).
À travers son enseignement, Jane Nelsen ouvre la voie d’une éducation différente. Comprendre le fonctionnement de l’enfant pour agir en fonction de ses besoins et dans le respect de chacun, voilà le but premier de la Discipline Positive.
Compréhension, écoute, amour, bienveillance et fermeté, limites, coopération, voilà autant de clefs pour établir une vie harmonieuse en famille et en classe avec des enfants et des parents respectés dans leur être.
Les propos sont parfois redondants, mais les nombreux exemples et conseils éclairent parfaitement le lecteur et donnent de très bonnes idées à mettre en pratique. À la maison comme en classe, une pédagogie basée sur la bienveillance est possible ! Cette méthode fait fureur aux États-Unis et gagne peu à peu l’Europe et la France. Mais comme toute méthode alternative, elle peut également déranger et agacer ou tout simplement montrer ses limites. Certains en effet lui reprochent d’être belle dans la théorie, côté pratique ce n’est pas la même chose.
D’autres regrettent qu’elle fasse culpabiliser les parents… Nombre de retours de lecture vont dans ce sens, mais de façon générale les parents sont plutôt pour… en théorie !
Ouvrage recensé– Jane Nelsen, La discipline positive : en famille et à l'école, comment éduquer avec fermeté et bienveillance, Paris, éditions Toucan, 2012.
Du même auteur– La discipline positive dans la classe, Paris, éditions Toucan, 2018.– La discipline positive pour les parents-solos, Paris, éditions Toucan, 2016.
Autres pistes– Catherine Gueguen, Pour une enfance heureuse, repenser l’éducation à la lumière des dernières découvertes sur le cerveau, Paris, Pocket, 2015.– Alison Gopnik, Anti-manuel d’éducation : l’enfance révélée par les sciences, Paris, Le Pommier, 2017.