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En mai 1789, aux états généraux, à Versailles, Maximilien de Robespierre (1758-1794) ne fait pas d’emblée figure de ténor. Pourtant, il acquiert vite un ascendant considérable au sein de l’Assemblée. À travers les aléas d’une période troublée, l’opposant de la Constituante, devenu l’un des tribuns du club des Jacobins, s’impose au-dessus des factions comme un gouvernant inflexible, au point de devenir l’un des artisans de la Terreur (1793-1794). Quels mécanismes favorisent cette radicalisation qui conduisit Robespierre à sa perte tout en divisant de manière profonde les lecteurs de cette page d’histoire ?
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Pierre Boucaud
En 2008, le socialiste Vincent Peillon publiait un ouvrage intitulé : La Révolution française n’est pas terminée. Or, Louis XVI était encore roi des Français que d’aucuns estimaient déjà l’épisode révolutionnaire achevé. La question a en effet très tôt divisé les contemporains, puis elle est devenue lancinante. De son côté, Robespierre a cru lui donner une réponse qui, de fait, a laissé le problème en suspens. Cette figure clivante fascine. Elle provoque chez les uns l’enthousiasme, chez les autres un rejet épidermique. Certains relèvent l’attachement viscéral de Robespierre à la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen et l’ambition de son projet fondateur. D’autres s’attardent exclusivement sur son rôle dans les atrocités de la Grande Terreur. La partialité fait au minimum oublier l’avocat arrageois et le membre d’une académie locale. Elle masque aussi l’auteur d’une œuvre abondante qui justifie l’intérêt des historiens et, en partie, le travail de la Société des Études Robespierristes. Car Robespierre n’est pas seulement un protagoniste majeur de la Révolution française. C’en est aussi un concepteur, imprégné qu’il est, comme tant d’autres, par l’esprit des Lumières, à travers l’influence de Jean-Jacques Rousseau dans son cas. Par ailleurs, Robespierre précise sa pensée sous la pression d’événements chaotiques qui lui imposent des inflexions et l’amènent à se contredire. Comment comprendre, par exemple, que le même homme propose à la Constituante la suppression de la peine de mort et finisse par en susciter l’une des applications les plus sanglantes de l’histoire du pays ? Et si, au-delà de l’homme et de son action, c’étaient les idées même de peuple et de liberté qui divisaient les Français, des révolutionnaires aux électeurs actuels ? Marcel Gauchet tente de saisir les mécanismes intellectuels et psychologiques qui ont rendu possible « la vertu par la terreur » (p. 166) en analysant les rôles successifs endossés par Robespierre : l’opposant, le tribun du Club des Jacobins et le gouvernant. C’est peut-être là qu’il faut trouver les raisons de cette révolution si difficile à terminer.
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