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Stanis Perez

Le Corps de la reine

Connue sous des traits encore stéréotypés aux XIe-XIIIe siècles, la reine de France « prend corps » au XIVe siècle. Sa personne physique et surtout son image, désormais produite « au naturel », sont alors mieux connues et mises en scène. Parfois influente, ce n’est jamais en son nom propre que la reine exerce le pouvoir, dont elle garantit pourtant la continuité. Soumise à un statut contraignant qui lui enjoint en premier lieu d’enfanter le prince, elle ne s’appartient guère. Son corps tend d’ailleurs à se réduire à un argument diplomatique. Progressivement banalisé, il finit même par être assimilé, au XIXe siècle, à celui d’une grande dame parmi d’autres.

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Pierre Boucaud

Le Corps de la reine
Le Corps de la reine

book.chapter Introduction

« Malheur à toi, pays dont le roi est un enfant ! » C’est en ces termes qu’au IIIe siècle av. J.-C., l’auteur du livre biblique de l’Ecclésiaste (10,16) souligne le danger que présente une minorité royale. Plus tard, le genre littéraire du miroir des princes, très en vogue au Moyen Âge, énumère et décrit les qualités attendues d’un prince mature, nécessaires à la stabilité du royaume, que menace la mort précoce du roi. Dans la France médiévale et moderne, le thème est d’une importance cruciale. Sous les Capétiens (987-1792) en effet, le pouvoir monarchique est héréditaire et transmis au fils aîné survivant : c’est la règle de primogéniture masculine, d’abord tacitement appliquée puis formulée au XIVe siècle en tant que principe successoral. Le roi seul est sacré, grâce à la fiction de l’huile contenue dans la sainte ampoule, conservée à Reims, et dont il est oint le jour du sacre, qui lui confère, à lui seul, la plénitude de la souveraineté. La sainte ampoule détruite en 1793, la monarchie ravivée selon diverses modalités après la Révolution n’a pas rompu avec l’exercice d’un pouvoir suprême masculin exclusif, tant s’en faut. La reine, pour sa part, est d’abord ce corps qui transmet la royauté par le sang. Ce statut particulier conditionne la perception de ce corps, dont Stanis Perez s’efforce de saisir l’évolution principalement dans la longue histoire d’une dynastie quasi millénaire, à partir de la fin du XIIe siècle, date à laquelle la documentation se fait plus loquace. Premier point, la reine est fondamentalement l’épouse légitime du roi. Soulignons ensuite l’importance de la maternité royale, dont la naissance d’un fils, le « dauphin », comme on le nomme à partir du XIVe siècle, est la traduction espérée. En troisième lieu, celle-ci justifie le traitement privilégié dont le corps et l’image de la reine font l’objet. Pourtant, autre point, la reine est aussi un corps malmené : indispensable à la continuité de l’État, ce corps subit les aléas de la vie et surtout les effets d’une misogynie ambiante qui le banalisent à mesure que s’affirme le corps du roi et que s’épanouit l’État moderne. Il est vrai, enfin, que cette évolution tient beaucoup au fait que la reine n’est pas destinée à régner.

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