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Stratégie Océan bleu

de W. Chan Kim et Renée Mauborgne

récension rédigée parCamille GuibbaudResponsable éditoriale indépendante.

Synopsis

Économie et entrepreneuriat

Best-seller sur cinq continents, Stratégie Océan bleu s’est vendu à plus de 3,5 millions d’exemplaires depuis sa sortie en 2015. Les auteurs ont créé deux allégories de la concurrence : celle de l’océan rouge, représentant un marché avec une forte concurrence, et celle d’un océan bleu, d’un marché neuf où la demande est nouvelle et la croissance forte et rentable. La stratégie océan bleu est donc le résultat théorique et pratique pour permettre aux entrepreneurs de quitter l’océan rouge et se diriger vers la création d’un océan bleu. La stratégie océan bleu se définit par les caractéristiques suivantes : créer un nouvel espace stratégique, délégitimer la concurrence, créer et conquérir une nouvelle demande, sortir de l’arbitrage entre valeur et coût, et pratiquer un management équitable.

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1. Introduction

Les auteurs ont relevé plusieurs croyances dans le domaine de la stratégie. Leur postulat de base s’appuie sur l’observation d’un des problèmes majeurs bloquant l’invention : « L’entreprise consacre […] son temps et son attention à se comparer à ses rivaux et à réagir à leurs actions stratégiques au lieu de se demander comment apporter un surcroît de valeur à ses clients – ce qui n’est pas la même chose. » (p. 5)

En effet, depuis les travaux de Michael Porter, la réflexion stratégique est axée sur la concurrence. Ainsi, une entreprise analyse la structure économique d’un secteur, compare son entreprise aux meilleures, puis réalise des choix d’orientation axés sur la domination par les coûts. Selon cette démarche devenue traditionnelle, il paraît hasardeux, voire risqué, pour un entrepreneur de chercher à créer un nouveau marché. Pour autant, la création de secteurs d’activité est loin d’être nouvelle. Or, l’environnement économique représentatif du XXe siècle est en voie de disparition, entraînant l’obsolescence des anciennes stratégies de management.

Riches de leurs expériences professionnelles, les auteurs proposent dans ce livre des outils et dispositifs qui ont été testés et affinés auprès d’entreprises, pendant plusieurs décennies. Mettant en parallèle les principes de formulations et d’exécutions de la stratégie océan bleu, et les risques encourus, les auteurs ont dégagé des constantes stratégiques. Ils proposent ainsi à n’importe quelle entreprise, quelle que soit son ancienneté ou sa taille, de créer de nouveaux espaces de marchés, liant innovation et valeur, économie rentable et dimension humaine, afin de saisir un maximum d’opportunités tout en réduisant ses risques.

2. Océan bleu et innovation-valeur

L’innovation-valeur est la pierre angulaire de la stratégie océan bleu.

Pour appréhender correctement la notion d’« innovation-valeur » telle que l’entendent les auteurs, il faut accorder une importance égale à la création de valeur et à l’innovation. L’innovation-valeur est un saut de valeur pour l’entreprise et pour le client. Ainsi, il ne faut pas se restreindre à l’innovation technologique ou à la réduction des marges. Les efforts d’innovation d’une entreprise correspondent à sa recherche de différenciation par rapport à ses concurrents. Son apport de valeur aux clients revient à proposer à la fois de l’utilité, un prix bas et des coûts de production faible. L’innovation et la valeur doivent être poursuivies conjointement pour parvenir à une stratégie océan bleu.

Cette conception stratégique s’oppose à celle, classique, d’arbitrage entre apport de valeur et domination par les coûts. Traditionnellement, l’entreprise cherche à se différencier, mais en contrepartie, elle augmente ses prix, ou encore, elle souhaite réduire ses coûts, mais pour cela elle impacte son apport de valeur aux clients et propose une offre de valeur banale à un prix d’achat réduit.

La grille des quatre questions à se poser pour allier apport de valeur et réduction des coûts est un outil utilisé par les auteurs, dont voici les questions : « Quels critères acceptés sans réflexion par les acteurs du secteur doivent être exclus ? Quels critères doivent être atténués par rapport au niveau jugé normal dans le secteur ? Quels critères doivent être renforcés bien au-delà du niveau jugé normal dans le secteur ? Quels critères jusque-là négligés par le secteur doivent être créés ? » (p. 49) Cette grille permet de définir une courbe de valeur, de recentrer la démarche stratégique sur les aspects essentiels du secteur, en repensant ses caractéristiques traditionnelles.

Par exemple, l’entreprise Le Cirque du Soleil a repensé son modèle selon la stratégie océan bleu. Elle a privilégié les spectacles à thèmes, aux ambiances raffinées, avec de la musique de qualité. En parallèle, elle a exclu les numéros avec des animaux et la présence de vedettes, tout en augmentant le prix des tickets. Ainsi, elle a amélioré la valeur proposée à ses clients avec des spectacles de qualité, tout en réduisant ses coûts grâce à l’exclusion et à l’atténuation de caractéristiques typiques de l’univers du cirque.

Pour parvenir à une stratégie océan bleu, il est nécessaire et indispensable de redéfinir les enjeux habituels du marché et de réinventer les éléments de valeurs du secteur. Cette remise en question permet de dépasser les frontières sectorielles et de réfléchir à une stratégie divergente, tout en conservant la recherche d’innovation et de valeur.

3. Créer un nouvel espace stratégique et mettre la concurrence hors-jeu

Les auteurs proposent six pistes de réflexion à l’entrepreneur souhaitant créer un nouvel espace stratégique tout en délégitimant la concurrence :

– Explorer des alternatives présentes sur le marché,– Porter un regard transversal sur d’autres groupes stratégiques,– Redéfinir son groupe cible,– Envisager des offres complémentaires,– S’interroger sur le contenu affectif et/ou fonctionnel de son secteur,– Situer son offre par rapport aux tendances majeures extérieures – comme, par exemple, la protection de l’environnement ou encore le cloud.

L’ensemble de ces pistes reposent sur la mise en perspective du marché et du secteur, afin de porter un regard transversal, de bousculer les idées reçues et de redéfinir les frontières entre les secteurs d’activités. Cependant, porter un regard alternatif sur son secteur ne suffit pas.

W. Chan Kim et Renée Mauborgne conseillent de penser comme un client, mais également comme un non-client – un client potentiel qui, pour l’instant, n’est que peu intéressé par votre produit ou votre service, voire qui est positionné contre votre marché. « Ce sont les non-clients, et pas les clients, qui en savent le plus sur les points douloureux et les points d’intimidation qui limitent la taille et les frontières d’une industrie. » (p. 244). Les auteurs proposent alors de réfléchir aux points communs, et non aux différences, réunissant les clients des non-clients. Cela permet d’envisager une nouvelle cible et donc une nouvelle courbe de valeur. Également, il apparaît indispensable de se demander ce qui se passe avant, pendant et après l’utilisation du produit ou du service proposé. Ainsi, les salles de cinéma pourraient s’équiper d’un service de baby-sitting pour permettre aux parents de profiter plus aisément et plus sereinement d’une séance.

Les auteurs permettent alors à l’entrepreneur d’envisager plus clairement les désagréments entourant son offre, de savoir comment améliorer la part innovation-valeur de l’offre tout en réduisant les coûts de l’entreprise. Ce qui regroupe l’ensemble des entreprises ayant réussi une démarche stratégique océan bleu, c’est qu’elles ont réussi à proposer une nouvelle offre et ainsi une nouvelle demande, mais surtout, elles sont parvenues à contourner la concurrence, sans la prendre comme référentiel.

4. Management équitable et management-point de bascule

Le management équitable est introduit par les auteurs comme la réponse pour pallier le manque de cohésion entre l’analyse stratégique et sa mise en œuvre par les entreprises : « […] le management équitable, c’est mobiliser toutes les personnes concernées, expliquer les raisons des décisions, des promotions et des sanctions et, enfin, préciser les performances que l’on attend d’elles. » (p. 189) W. Chan Kim et Renée Mauborgne soulignent qu’il est indispensable d’obtenir l’adhésion de tous les intervenants entourant la nouvelle stratégie. Or, la plupart des entreprises différencient formulation d’une stratégie et son exécution. La stratégie établie doit être communiquée, expliquée et détaillée à chaque intervenant interne et externe à l’entreprise, et ce, dès son élaboration.

Pour pallier les nombreux obstacles récurrents à toute mise en place stratégique, comme un manque de motivation, peu de financement, des habitudes ancrées ou encore des luttes de pouvoir en interne et en externe, les auteurs préconisent un management-point de bascule. Ce dernier correspond à un leadership prenant le contre-pied des idées reçues sur la façon de réaliser des changements stratégiques. Grâce à cette méthode, les salariés sont stimulés et accompagnés, car leurs valeurs intellectuelles et humaines sont appréciées, malgré tous les progrès restants à accomplir. Pour qu’aucun changement ne paraisse insurmontable, les auteurs parlent de « fractionnement » et de « concentration » : il est nécessaire de définir des objectifs concrets et circonscrits à ces collaborateurs pour que chaque nouvelle étape soit réalisable.

Enfin, pour faire face aux détracteurs, il apparaît indispensable de trouver tout d’abord ses alliés, de connaître les angles d’attaque des « mauvais anges » et de construire ses contre-arguments en s’appuyant sur des faits et des raisonnements irréfutables, bien souvent des chiffres. Comme le rappellent les auteurs en titre d’un de leur chapitre, attention cependant à ne pas oublier de donner la priorité aux questions de fond, et non aux chiffres – qui peuvent être manipulés à l’avantage de chacun.

5. Mise en place stratégique théorique et pratique

Afin de définir une stratégie océan bleu rentable, les auteurs proposent de se poser plusieurs questions, jusqu’à l’obtention de réponses affirmatives, et ce, dans l’ordre établi par les auteurs :

« Votre idée comporte-t-elle une utilité exceptionnelle pour l’acheteur ? Votre prix est-il bien accessible à la masse des acheteurs ? Votre prix vous permet-il de maintenir votre coût cible sans sacrifier la rentabilité ? Quels problèmes d’adoption pourraient faire obstacle à la réalisation de votre idée […], les affrontez-vous hardiment ? » (p. 142)

En alliant utilité exceptionnelle de l’offre, prix stratégique et objectifs des coûts réfléchis, une entreprise peut parvenir à une stratégie reposant sur l’innovation-valeur.

Une stratégie océan bleu passe par une réflexion transversale, basée sur une offre focalisée, et un slogan fort, mais aussi sur une excellente communication. Chan Kim et Mauborgne présentent également différentes techniques de réflexion pour comprendre comment définir une offre que ni les clients, ni les salariés, ni les partenaires, ni l’opinion publique ne pourront refuser. Tout d’abord, l’entreprise doit être à l’initiative du débat sur la nécessité d’adopter une nouvelle stratégie, expliquant, informant et détaillant pourquoi un nouveau produit ou un nouveau service est nécessaire, et ce, avec ses salariés, ses partenaires et l’opinion publique.

Au-delà de la théorie, les auteurs sont allés à la rencontre des entreprises pour mettre en pratique leur méthode stratégique. Ils ont alors incité les entrepreneurs et les dirigeants à observer différents terrains d’études et à tracer la courbe de valeur de leur entreprise, voire de chacune de leur unité. Les auteurs expliquent comment ils ont réussi à faire travailler ensemble les responsables, les cadres, les salariés, les clients et les non-clients de l’entreprise FE (Financière d’Europe) pour se fixer une nouvelle démarche stratégique. De même, l’ensemble des participants a pu s’exercer à choisir un slogan illustrant la stratégie choisie.

De cette expérience sur le terrain, les auteurs ont tiré une leçon précise pour parvenir à définir un océan bleu : les représentants et les équipes doivent communiquer visuellement les décisions stratégiques à l’ensemble des intervenants, pour former un langage commun et développer une culture d’entreprise basée sur la confiance, l’investissement et la bonne volonté de chacun.

6. Agrandir et renouveler son océan bleu

La transformation d’un océan bleu en océan rouge peut prendre du temps, mais est un risque qu’aucune entreprise ne peut ignorer, car les imitateurs sont nombreux.

Pour faire face à cette situation, les auteurs préconisent de faire le point sur la courbe de valeur de son entreprise et de visualiser si elle se rapproche peu à peu de celles des concurrents. Si tel est le cas, alors il faut repenser son modèle et rechercher à quel degré d’imitation et de convergence en sont les concurrents, pour mieux s’en éloigner et se différencier. Si la courbe de valeur de l’entreprise est encore différente des concurrents, mais proche, alors les auteurs préconisent la recherche d’améliorations opérationnelles et une expansion géographique.

En effet, la création d’un océan bleu n’est pas un aboutissement, mais un processus dynamique. Cependant, avant de voir son océan rouge se transformer en océan bleu, les auteurs proposent de se pencher sur plusieurs « barrières » à l’imitation, faisant partie intégrante de la stratégie océan bleu.

Principalement, la barrière d’alignement permet de s’assurer que les trois propositions essentielles à une stratégie océan bleu sont alignées :

– La proposition de valeur : utilité obtenue par les acheteurs d’une offre moins le prix à payer pour l’obtenir ;– La proposition de profit : les revenus que l’entreprise tire d’une offre moins les coûts supportés pour la produire et la fournir ;– La proposition humaine : management équitable par le point de bascule.

L’ensemble de ces propositions doivent être pensées pour poursuivre le but de focalisation, de différenciation et de coûts bas. En cas de glissement vers un océan rouge, le tout est de reprendre étape par étape la méthode stratégique océan bleu et de faire le point sur l’alignement de ses propositions.

7. Conclusion

La notion d’« innovation-valeur » est capitale pour appréhender et mettre en place la stratégie océan bleu, c’est pourquoi les auteurs ont précisé et rappelé ce concept tout au long du livre, à travers divers exemples pratiques.

Pareillement, l’idée de transversalité est représentée tout au long du livre et, les auteurs invitent qui le veut bien à penser autrement, à tordre le cou aux vieilles habitudes et aux anciennes méthodes stratégiques. Dernière base capitale et indispensable de la stratégie océan bleu, le management équitable – concept plus contemporain que jamais en 2018 –, est analysé, expliqué et mis en pratique au fil des nombreux exemples présentés par les auteurs.

C’est grâce à cette formule efficace et concrète que ce livre est devenu un best-seller sur les cinq continents. De par ses exemples, ses propositions stratégiques et ses conseils, Stratégie Océan bleu reste, encore aujourd’hui, très moderne.

8. Zone critique

Les observations et les méthodes de W. Chan Kim et Renée Mauborgne ont suscité de nombreuses remises en question et de nombreux débats auprès d’entrepreneurs, mais aussi d’universitaires. En effet, depuis la sortie de l’ouvrage, les auteurs annoncent à sa réimpression plus de 4 000 articles analysant la stratégie océan bleu.

Ayant nourri leur première publication de nombreux exemples pratiques, mais aussi de ressources universitaires, les auteurs ont montré qu’ils ne s’étaient pas simplement inspirés des théories économiques et stratégiques citées, mais qu’ils proposaient là leur propre interprétation à la suite de leurs expériences sur le terrain.

Pour répondre à tous les questionnements suscités par la première édition du livre, les auteurs ont ajouté trois chapitres à la dernière édition en axant leur réflexion sur les principes de l’alignement, de renouvellement et des pièges à éviter.

9. Pour aller plus loin

Ouvrage recensé– Stratégie Océan bleu. Comment créer de nouveaux espaces stratégiques, Pearson France, 2015, 2e édition.

Autres pistes– Michael Ballé et Godefroy Beauvallet, Le Management lean, Pearson France, 2016.– Malcolm Gladwell, Le Point de bascule : comment faire une grande différence avec de très petites choses, Transcontinental, Montréal, 2003.– Paul Lester, Visual Communication Images with Messages, Wadsworth Publishing Company, Belmont, 2e edition, 2000.– Henry Mintzberg, Grandeur et Décadence de la planification stratégique, Dunod, Paris, 1994.– Pierre Pichère, La stratégie Océan bleu selon C. Kim et Mauborgne, 50 minutes, Bruxelles, 2014.

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