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Social Calling

de Émilie Vidaud

récension rédigée parCamille GuibbaudResponsable éditoriale indépendante.

Synopsis

Économie et entrepreneuriat

Émilie Vidaud, a enquêté pendant dix-huit mois sur un nouveau phénomène économique et social : la social tech, ou l’utilisation des procédés technologiques pour améliorer la société et l’environnement social. Elle s’est alors demandé quel était le dénominateur commun de l’ensemble de ces entrepreneurs sociaux français et en a défini le social calling, le « déclic pour agir ». Elle a ensuite décidé de contacter un grand patron pour essayer de provoquer chez lui un social calling !

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1. Introduction

Être utile à la société, résoudre des problèmes sociétaux, à l’aide de la technologie. Voilà ce qu’est la social tech. L’idée première présentée dans ce livre est l’étude des social calling d’entrepreneurs français, suivis pendant dix-huit mois par l’auteure. Les dix entreprises présentées sont rentables, durables et n’ont pas pour unique mission d’engranger des profits. La force d’engagement et l’histoire personnelle de chacun des entrepreneurs sont inspirantes et enthousiasmantes.

Voilà les raisons pour lesquelles l’auteure les a sélectionnés. Inspirée par leur détermination, elle s’est mise en tête de sensibiliser un grand patron à la social tech afin de provoquer, peut-être, un social calling. Elle a alors choisi de proposer son projet à Jacques-Antoine Granjon, fondateur de vente-privee, Veepee. Le fondateur de Veepee a alors accepté de rencontrer et d’échanger sans langue de bois avec les dix entrepreneurs sélectionnés par l’auteure, mais aussi d’écrire le dernier chapitre du livre pour révéler son social calling, ou non.

Voilà le défi de ce livre : provoquer un social calling chez un grand patron !

2. Qu’est-ce que vente-privee et qui est Jacques-Antoine Granjon ?

Riche de 50 millions de membres, le site vente-privee est l’un des plus visités en Europe. Créé en 2001 par Jacques-Antoine Granjon, Veepee propose des ventes événementielles de grandes marques, à des prix défiant toute concurrence. Chaque jour, 180 000 colis sont expédiés et, chaque année, plus de 120 millions de produits sont vendus. 67e fortune de France en 2016, Jacques-Antoine Granjon ne cache pas sa réussite.

À 57 ans, en 2019, il est à la tête d’un patrimoine estimé à plus d’un milliard d’euros selon le classement 2016 du magazine Challenges. Amateur d’art contemporain, il aime raconter des histoires, multiplier les bons mots et les conseils. Pensant en permanence à son entreprise, il est également président du conseil d’administration du palais de Tokyo, centre d’art moderne et contemporain à Paris.

Au cours des deux dernières décennies, il a créé l’École européenne des métiers de l’Internet, avec Xavier Niel (Free) et Marc Simoncini (Meetic). Il a également financé et lancé de nombreuses start-up (Restopolitan, Weezevent, Looklet, Misterfly, etc.). Installant les locaux de Veepee au cœur de la Plaine Saint-Denis, il en a redessiné l’architecture grâce à l’installation de six bâtiments où naviguent plus de 5 000 collaborateurs, au milieu d’œuvres d’art.

Obnubilé par le bien-être au travail, Jacques-Antoine Granjon a mis à disposition de ses collaborateurs des assistants sociaux qui sont là pour les épauler en cas de coup dur, mais également des professeurs particuliers pour aider les enfants de ses employés. Dans le même esprit, la fondation vente-privee de Seine Saint-Denis aide à améliorer les conditions de vie des femmes et des enfants. Son bâtiment, le Vérone, face au Stade de France, possède un écran de 102 mètres carrés, accroché à sa façade. Possédant un espace publicitaire hors du commun à l’entrée de la capitale, Jacques-Antoine Granjon a conscience de la pollution visuelle que représente la publicité.

Ainsi, il a préféré diffuser des messages poétiques et des photographies animalières. L’entrepreneur considère qu’une entreprise doit être profitable à ses collaborateurs, à l’écosystème et à la société, alors s’il est ou non un entrepreneur social, cela n’est pas important pour lui.

3. Raodath Aminou et OptiMiam, lutter contre le gaspillage alimentaire

Raodath Aminou a eu son baccalauréat à l’âge de 16 ans et elle arrive au même âge en France, grâce à une bourse d’excellence financée par l’ambassade de France au Bénin. Ingénieure, elle a débuté chez Edmond de Rothschild Asset Management à l’âge de 21 ans. Écœurée par la finance, elle démissionne et souhaite lancer une start-up pour améliorer la vie des Français.

Acceptée à Polytechnique pour y suivre une formation, elle doit trouver un projet entrepreneurial à réaliser au cours de son année d’étude. Quelques jours avant sa rentrée, elle se balade dans les rues de Paris encore en quête de la bonne idée. À 20 heures, un restaurateur brade ses produits invendus de la journée. Tout à coup, Raodath a son social calling : combien de repas pourraient être composés pour nourrir les gens avec ces plats invendus ? En France, 10 millions de tonnes de nourriture sont gaspillées chaque année dont 6,5 millions au sein des foyers français ! Chaque seconde, 38 kg de nourriture comestible sont jetés à la poubelle ! Par an, cela représente entre 500 et 1 500 euros de nourriture encore consommable par personne.

C’est pour toutes ces raisons que Raodath a alors eu l’idée de redistribuer le surplus des restaurants en le bradant. Pour cela, elle a créé l’application OptiMiam qui alerte les consommateurs sur les promotions de produits frais sur le point d’être jetés. En 36 mois d’activité, l’application a permis de sauver 20 tonnes de nourriture de la poubelle, et ce, grâce à 160 000 utilisateurs. Après avoir rencontré et échangé avec Raodath, Jacques-Antoine Granjon reconnaît la légitimité d’une telle application dans le monde de la consommation tel que nous le connaissons aujourd’hui.

À ce jour, OptiMiam fait face à de nouveaux challenges : couvrir tout le territoire français et convaincre les consommateurs d’aller faire leurs courses dans les magasins et restaurants partenaires. Même si ce n’est pas facile tous les jours, Raodath explique que sa vie a du sens et que cela change tout !

4. Gaele Regnault, LearnEnjoy, l’accès à la scolarité pour tous

En 2017, mère de trois enfants, Gaele Regnault a vu son fils Louis, 12 ans, entrer en CE2, avec cinq années de retard.

Cela pourrait paraître surprenant, mais, pour Gaele, il s’agit d’une véritable victoire ! Louis est atteint d’une forme sévère d’autisme. Elle a passé des années à être jugée par les psychologues, à voir Louis être refusé par des écoles, à convaincre la protection de l’enfance de ne pas arracher son fils à sa famille, mais aussi à ignorer les gens dans la rue et la société qui ne voyaient qu’un enfant bruyant, dissipé et violent avec une mère incapable de l’éduquer. L’autisme est un trouble du neuro-développement dû à une mauvaise connexion des synapses dans le cerveau. On ne peut pas guérir cette maladie, mais on peut permettre aux enfants atteints d’autisme de gagner en autonomie.

La méthode ABA (Applied, Behavior, Analysis Tech, Denver Model) permet, depuis 1991 aux États-Unis, un traitement médical et pédagogique reconnu. Des jeux et des exercices ciblés permettent d’améliorer les aptitudes sociales et cognitives des enfants autistes en leur permettant de réduire leurs comportements inadaptés (violence, cris, mutilations, etc.). Il faut attendre 2012 pour que la France reconnaisse officiellement la méthode ABA.

Pourtant, en 2017, un numéro vert n’avait toujours pas été proposé et c’est Gaele Regnault qui répondait à plus de 110 appels par semaine pour venir en aide aux familles. Face au manque d’outils mis en place par l’État, Gaele, spécialiste des systèmes informatiques pour de grandes entreprises françaises, souhaite créer une application. Elle crée alors LearnEnjoy qui permet à 80 000 enfants autistes, exclus du système scolaire, d’avoir accès à des outils numériques adaptés à leurs besoins. L’application permet également aux aidants professionnels et aux familles d’avoir accès à des formations et à un accompagnement. Six ans après le lancement de l’application, LearnEnjoy a reçu de nombreuses distinctions et plus de 2 000 parents et professionnels ont été formés à l’autonomisation des enfants dans leur quotidien.

Face au désarroi de Gaele, à sa lutte et à son énergie, Jacques-Antoine Granjon est resté interdit. Neuf mois après leur entrevue, le 2 avril, à l’occasion de la Journée mondiale de la sensibilisation à l’autisme, la façade du Vérone était éclairée de bleu… – couleur symbolisant la lutte contre l’autisme.

5. Jean-Charles Samuelian et Alan, mieux assurer et mieux soigner

Ingénieur de la génération des Millennials – génération née entre la fin des années 1970 et le milieu des années 1990 –, Jean-Charles Samuelian souhaite interroger en permanence la cohérence de ses actions par rapport au sens donné à sa vie. Pour lui, avoir un impact positif sur la société permet d’avoir le sentiment d’être utile.

Alors, il entreprend pour résoudre des dilemmes. Jean-Charles Samuelian a 28 ans quand il crée la première assurance complémentaire santé numérique. L’entrepreneur cherche à comprendre comment et pourquoi le cancer de son grand-père a été très mal diagnostiqué, comme il a été compliqué pour lui et sa famille, pourtant médecins, de trouver le bon soignant. Il a surtout souhaité comprendre comment une meilleure prévention aurait pu être faite. Il a alors analysé le fonctionnement des assurances et a découvert que les datas des individus passaient par des courtiers, qui n’utilisaient pas celles-ci pour aider le patient, mais pour adapter leurs marges financières.

À cela, Jean-Charles Samuelian a décidé de créer une assurance complémentaire santé simple à utiliser, permettant de réduire les coûts, et proposant une prévention personnalisée.

Les entreprises, les indépendants, les freelances et autres professionnels libéraux peuvent adhérer à Alan en moins de 5 minutes, pour un coût compris entre 40 et 100 euros. Quelle différence avec les autres assurances complémentaires santé ? En cas de maladie, Alan propose le bon hôpital et le bon médecin selon la pathologie. Par « bon médecin », Jean-Charles Samuelian entend « celui qui a vu des patients avec la même pathologie […], qui affiche ses tarifs de façon à ce que [l’on] parte en connaissance de cause » (p. 142).

L’entrepreneur fait alors en sorte que l’application adaptée du site Internet Alan soit aisément utilisable, tant par les professionnels que les patients. Le tarif de cet assureur numérique ne change pas selon les risques liés à l’histoire médicale du patient, mais selon son âge.

Après avoir levé 12 millions d’euros en 2016, Alan s’est constitué des meilleurs professionnels du secteur, et ce, grâce à une mission sociale ayant permis de définir par elle-même l’image d’entreprise de cette start-up. Jacques-Antoine Granjon a alors échangé avec Jean-Charles Samuelian concernant les erreurs, mais aussi comment et pourquoi se séparer d’un collaborateur.

En définitive, ils se rejoignent sur la confiance à accorder à ses propres pressentiments et sur le peu d’importance que sont les erreurs, car c’est la détermination et le courage qui permettent à une entreprise de perdurer.

6. Le social calling de Jacques-Antoine Granjon

Après avoir échangé avec les entrepreneurs sélectionnés par l’auteure, Jacques-Antoine Granjon a révélé que son social calling n’était autre que vente-privee. Sans se dérober derrière l’image de son entreprise, l’entrepreneur français explique que celle-ci est une véritable caisse de résonance permettant de mettre en lumière celles et ceux qui changent le monde.

Ainsi, sous l’impulsion de sa femme et associée, Éléonore, Jacques-Antoine Granjon aide l’association L214, en faveur de l’abolition de toute exploitation animale. Ayant tiré son nom de l’article L214-1 du code rural, qui reconnaît en 1976 que les animaux sont des « êtres sensibles », l’association publie des vidéos-chocs sur les réseaux sociaux, vidéos toujours accompagnées de pétitions. Si, aujourd’hui la cause animale suscite l’attention de l’opinion publique, du personnel politique et du droit français, 3 millions d’animaux sont encore tués par jour. L’engagement de Jacques-Antoine Granjon permet à l’association d’être entendue, et les fondateurs de l’association y trouvent beaucoup d’espoir et de courage pour continuer leurs démarches. En 2012, alliant engagement et actions concrètes, vente-privee a cessé de vendre des billets pour les zoos et delphinariums.

Dans le même sens, à l’heure où le livre était écrit, Éléonore et Jacques-Antoine Granjon réfléchissaient aux mesures à prendre pour arrêter la vente de vêtements confectionnés avec de la fourrure animale. Malgré le manque à gagner financier conséquent que cela représentait, le bénéfice éthique et l’impact politique étaient, à leurs yeux, plus importants.

Conseillant tour à tour les entrepreneurs qu’il a rencontrés, Jacques-Antoine Granjon revient, à la fin de l’ouvrage, sur leur force, leur créativité, leur liberté, leur capacité à innover et à prendre des risques.

Admiratif de leurs combats et de leurs missions, Jacques-Antoine Granjon conclut en observant que ces entrepreneurs prouvent que notre époque, le XXIe siècle, est celle « où l’on ne peut plus passer à côté de la réalité sociale » (p. 254). Encourageant leurs actions, il salue leur engagement et invite chacun d’entre nous à soutenir de telles initiatives. Le faisant lui-même grâce à son entreprise vente-privee, Jacques-Antoine Granjon conclut que c’est sûrement cela son (deuxième !) social calling : soutenir ces entrepreneurs en leur offrant une visibilité certaine.

Discret et modeste concernant ses propres initiatives, il ne souhaite pas les rendre publiques, car celles-ci ne doivent pas être du marketing : « [je] trouve que l’on n’en fait jamais assez. Ce [ne doit pas être, en] aucun cas[,] un outil de communication. » (p. 177)

7. Conclusion

Ne traitant pas uniquement des domaines de l’alimentaire et de la santé, l’auteure a également interviewé des entrepreneurs ayant agi pour faire baisser le chômage, pour repenser et proposer une nouvelle méthode d’éducation, pour protéger les animaux, ou encore pour rapprocher les citoyens d’actions politiques et sociales près de chez eux.

Donner une définition de l’entrepreneuriat social n’est pas chose aisée et cela a suscité une longue et pénible conversation entre l’auteure et Xavier Niel. Ce que nous pouvons en retenir est qu’une entreprise sociale considère le profit comme un moyen et non comme une fin en soi.

Si cette définition est si difficile à préciser, c’est que nombreuses sont les entreprises qui aujourd’hui utilisent l’aspect social de leurs démarches pour faire briller leur image. Cependant, cette mouvance très en vogue plébiscitée par les Millennials qu’est la social tech peut être une véritable solution à des problèmes, toujours plus visibles, pour lesquels nombreux sont ceux souhaitant agir, pour les êtres humains comme les animaux.

8. Zone critique

Pléthore d’ouvrages proposent l’étude de parcours d’entrepreneurs, mais peu permettent à ce point l’étude de leur biographie et ainsi leur social calling.

Ce livre met donc en lumière des initiatives inspirantes, permettant au lecteur de s’identifier à quelques profils. Toutefois, nous remarquons que les propos tenus concernant l’écologie et l’agriculture, en 2017, sont aujourd’hui toujours d’actualité, ce qui tend à montrer que ces bonnes idées présentées peinent à être mises en pratique au niveau national.

Pourtant, de plus en plus de fermes et d’agriculteurs modifient leurs fonctionnements. Jacques-Antoine Granjon intervient alors en incriminant les lobbys de l’agroalimentaire qui, plus présents que les lobbys citoyens, font voter des lois favorisant l’aspect financier et non le bon sens. Dans ce domaine, comme dans d’autres, face à tant de politique, les entrepreneurs sociaux ne désespèrent pas et continuent à proposer des solutions à des problèmes sociaux, éthiques et sanitaires.

9. Pour aller plus loin

Ouvrage recensé

– Social Calling – Et si, comme eux, vous aviez un déclic pour agir ?, Fayard, 2017.

Autres pistes

– Emmanuelle Flahault-Franc et Anne-Sophie Frenove, Into the French Tech – 50 grands entrepreneurs coachent votre start-up !, Paris, First, 2018.– Audrey Garric, « L214, la méthode choc pour dénoncer les abattoirs », Le Monde, 28 mars 2016.– Mouvement des entrepreneurs sociaux, L’efficacité économique au service de l’intérêt général – Le livre blanc des entrepreneurs sociaux, Paris, éditions Rue de l’échiquier, 2012.– Pierre Rabhi, La Part du colibri – L’espèce humaine face à son devenir, La Tour-D’Aigues, Éditions de L’aube, coll. « Mikros essai », 2018.

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