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Voici le résumé de l'un d'entre eux.

La Fabrique du crétin digital

de Michel Desmurget

récension rédigée parAnne-Claire DuchossoyDoctorante en littérature française (Universités de Bordeaux Montaigne et Georg-August Göttingen).

Synopsis

Développement personnel

Publié en 2019, cet ouvrage traite des dangers des écrans pour les enfants. Ceux-ci ont une consommation importante d’écrans en tout genre dès l’âge de deux ans dans les pays occidentaux, ce qui a de profondes conséquences sur leur santé. Michel Desmurget, s’appuyant sur de nombreuses études, souhaite alerter les parents sur ce fléau numérique.

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1. Introduction

C’est un débat très actuel que celui de l’utilisation des écrans chez les enfants et les jeunes adolescents. Les parents s’en plaignent mais y contribuent largement. Michel Desmurget, docteur en neurosciences, s’y attarde longuement, car pour lui, plus qu’un problème, c’est un véritable fléau qui a des conséquences dramatiques sur la santé psychique et physique des enfants. Il fustige ainsi ceux qui modèrent le propos.

S’interrogeant sur les discours trop optimistes, il dresse le bilan de la consommation actuelle des écrans par les enfants et les adolescents. Il s’attarde ensuite sur les conséquences que cette consommation entraîne, avant de proposer quelques astuces pour en sortir.

2. L’utilisation des écrans

Première chose, il ne s’agit pas pour l’a uteur de dénoncer tout le numérique car « il existe une différence fondamentale entre utiliser son écran pour regarder un programme abêtissant de téléréalité ou lire un quotidien au format numérique » (p. 178). Il est question ici de s’interroger sur les conséquences d’une exposition intensive des jeunes aux écrans. Il n’est encore une fois absolument pas question de remettre en cause toute la modernité et les avancées technologiques : le progrès est incontestable. Mais les préjudices d’un usage intensif des écrans sont multiples et ont un impact sur « les quatre piliers constitutifs de notre identité : le cognitif, l’émotionnel, le social et le sanitaire » (p. 181).

Quelle est donc cette utilisation des écrans ? Les enfants de moins de 2 ans passent environ 600 heures par années devant des écrans (les 3/4 d’une année scolaire d’école maternelle). Souvent les parents sont absents et, même s’ils sont présents, il n’y a pas d’interaction, ce qui est d’autant plus problématique. Entre 2 et 4 ans, il est question de 2h45 d’écran par jour, puis 3h par jour : « cela veut dire qu’entre 2 et 8 ans un enfant moyen consacre aux écrans récréatifs l’équivalent de 7 années scolaires complètes… » (p. 193)

Pour ce qui est des préadolescents (8-12 ans), ils passent près de 4h40 de temps devant les écrans, soit 1 700 heures par an qui correspondent à deux années d’école ou une année de salariat à temps plein…

À l’adolescence, c’est l’apothéose. En effet, les 13-18 ans passent 6h40 devant les écrans, soit 2 400 heures. Il n’y a pas de gros écarts entre les filles et les garçons. La différence est dans le support : les premières passent plus de temps sur les réseaux sociaux, les seconds sur les jeux vidéo.

C’est dans les milieux défavorisés que la consommation d’écran est la plus importante, mais des études ont prouvé que cette consommation a des conséquences plus importantes sur les enfants de milieux favorisés car ces heures d’écran « s’opèrent au détriment d’expériences plus riches et formatives (lecture, interactions verbales, pratiques musicales, sportives ou artistiques, sorties culturelles, etc.) » (p. 194). De plus, le contexte familial favorise l’utilisation des écrans : plus les parents sont eux-mêmes consommateurs, plus les enfants le deviennent.

3. Les intérêts de l’industrie

Il va sans dire que cette profusion d’écrans va dans le sens de la consommation et de l’enrichissement des multinationales au détriment de la santé publique : « D’un point de vue strictement financier, il est toujours rentable de préférer l’intérêt industriel à la santé publique » (p. 64).

L’auteur rappelle les mots d’Aldous Huxley : « La dictature parfaite. Une prison sans murs dont les prisonniers ne songeraient pas à s’évader. Un système d’esclavage où, grâce à la consommation et au divertissement, les esclaves auraient l’amour de leur servitude » (p. 228). La numérisation de la société (qu’il s’agisse de la sphère intime ou scolaire) répond donc plus à une logique économique qu’à une logique pédagogique.

Michel Desmurget nous invite donc à faire attention aux paroles de certains experts qui, soit dit en passant, travaillent pour de grandes industries numériques. Selon lui, nombre d’études sont fausses et certains discours devenus légendes urbaines vont à contresens de la stricte réalité. C’est pour toutes ces raisons qu’il propose une étude complète pour que chacun prenne conscience de cette triste et alarmante réalité.

4. L’effet des écrans sur résultats scolaires

Michel Desmurget insiste sur le fait que les écrans ne font pas bon ménage avec les résultats scolaires. Au contraire, les écrans ont un effet délétère sur la réussite scolaire : « Plus les enfants, adolescents et étudiants passent de temps avec leurs doudous numériques, plus leurs notes chutent » (p. 218).

Qu’il s’agisse de télévision, de jeux vidéo, téléphone ou tablette, le résultat est le même. Un enfant/adolescent, sans écran, atteint de meilleurs résultats que s’il en possédait. L’auteur insiste sur le smartphone qui pour lui est « le graal des suceurs de cerveaux, l’ultime cheval de Troie de notre décérébration. Plus ses applications deviennent intelligentes, plus elles se substituent à notre réflexion et plus elles nous permettent de devenir idiots. » Ce qu’il faut saisir, c’est que, sous couvert de divertissement numérique, on accorde de moins en moins de temps aux devoirs, ce qui a, cela va de soi, des conséquences sur les résultats scolaires.

De plus, même si l’on a tendance à mettre en exergue les outils pédagogiques numériques, aucune étude sérieuse ne prouve que ces derniers ont une influence positive et permettent d’acquérir de meilleurs résultats ; surtout ils ne peuvent pas palier un enseignement médiocre. Un enfant en difficulté réussira toujours mieux avec un enseignant compétent. Un logiciel ne remplacera donc jamais un bon professeur ! Sans parler de la distraction que tous les écrans peuvent apporter pendant les cours faisant ainsi dévier l’attention des étudiants.

De plus, il faut également se méfier des contenus soit disant culturels et instructifs que l’on trouve sur Internet, les moteurs de recherche pouvant vite vous mener à des sites peu fiables.

5. Des conséquences sur la santé et le développement

Un enfant qui passe du temps sur les écrans ne le passe pas à interagir avec les autres. Les parents, de leur côté, ne sont pas disponibles pour leurs enfants lorsqu’ils sont rivés sur leurs écrans ! La deuxième conséquence sur le développement est celle du langage et de l’écrit. Cela réduit la qualité et la quantité des échanges verbaux et de l’entrée dans l’écrit : « En matière de développement du langage, ce n’est pas parce qu’il est préférable de mettre l’enfant devant un écran plutôt que de l’enfermer seul dans le noir d’un placard à balais que l’on peut sans dommage, en l’absence de placard, remplacer l’humain par l’écran » (p. 294). Pour développer le langage, l’enfant a besoin d’être sollicité, de converser avec les autres.

Bien plus, l’usage des écrans porte atteinte à la concentration. Le cerveau n’est pas fait pour être sollicité par autant de choses ; en conséquence, ce flux d’informations numériques perturbe son développement. Lors de ses premières années, et tout au long de la maturation, le cerveau traverse des périodes sensibles pendant lesquelles des compétences spécifiques se mettent en place et où l’apprentissage est rapide et solide.

Il est donc important de lui offrir un bon environnement sans non plus tomber dans la sur-stimulation. L’enfant « a besoin d’expérimenter, de mobiliser son corps, de courir, de sauter, de toucher, de manipuler des formes riches. Il a besoin de dormir, de rêver, de s’ennuyer, de jouer à faire semblant. Il a besoin de regarder le monde qui l’entoure, d’interagir avec d’autres enfants. Il a besoin d’apprendre à lire, à écrire, à compter, à penser » (p. 209).

Les études ont prouvé qu’un usage intensif des écrans a des conséquences directes sur le sommeil. Et qui dit manque de sommeil dit perturbation des fonctionnements intellectuels et de l’apprentissage. Le manque de sommeil affecte la maturation cérébrale et donc le système cognitif. Il affaiblit aussi le système immunitaire, ce qui rend l’enfant plus sujet aux maladies.

Le manque de sommeil accentue également les risques d’obésité, sans oublier que les écrans poussent à la sédentarité, donc à l’obésité : « Rester assis nous tue ! Faire de l’exercice nous construit ! ; et pas seulement dans nos dimensions physiques. Bouger a un impact majeur sur notre fonctionnement émotionnel et intellectuel » (p. 336). Pour finir, l’accès aux écrans augmente les comportements à risque : tabac, alcool, violence, sexe…

6. Alors que faire ?

Quelle recommandation suivre ? Elle est simple : pas d’écran avant 6 ans. Pour les enfants de plus de 6 ans, il est préférable que la consommation d’écran soit entre 30 et 60 minutes par jour, mais l’auteur précise qu’un « enfant qui ne consommerait aucun écran récréatif les jours d’école et regarderait un dessin animé ou jouerait aux jeux vidéo pendant 90 minutes les mercredis et samedis resterait largement dans les clous » (p. 211).

Il existe trois types de parent : « permissif (pas de règles), autoritaire (règles rigidement imposées), persuasif (règles expliquées). Pour chacun de ces styles, la proportion d’enfants susceptibles de regarder la télé plus de 4 heures par jour s’établissait respectivement à 20 %, 13 % et 7 % » (p. 200). Plus on explique aux enfants les raisons des limites qu’on leur impose, plus ils les comprennent. Des règles sont donc à imposer : pas d’écrans avant l’école, pendant les devoirs, avant d’aller dormir, pas d’écran dans la chambre, pas à table, pas pendant les discussions en famille, pas de contenus non adaptés à l’âge et un seul écran à la fois.

Mais surtout, il faut expliquer à l'enfant pourquoi on restreint l’usage des écrans : « Quand il demande pourquoi il n’a “pas le droit”alors que ses copains font “ce qu’ils veulent”, il faut lui expliquer que les parents de ses copains n’ont peut-être pas suffisamment étudié la question ; il faut lui dire que les écrans ont sur son cerveau, son intelligence, sa concentration, ses résultats scolaires, sa santé, etc., des influences lourdement négatives ; et il faut préciser pourquoi : moins de sommeil ; moins de temps passé à des activités plus nourrissantes, dont lire, jouer d’un instrument de musique, faire du sport ou parler avec les autres ; moins de temps passé à faire ses devoirs ; etc. » (p. 201). L’enfant est apte à comprendre ce discours qui fera son chemin.

Tout le temps perdu devant les écrans peut alors être utilisé à d’autres activités : sport, musique, lecture, discussion, sorties, balade… Et si au début ils pestent, très vite les enfants seront heureux de découvrir d’autres choses et de partager des moments avec les autres ; et ils en remercieront leurs parents lorsqu’ils seront grands. Pour finir, l’auteur explique que, depuis quelques temps, les mentalités tendent à changer, la prise de conscience de ce fléau numérique se développe… Il y a donc encore de l’espoir !

7. Conclusion

Si certaines études tendent à prouver que les écrans ne sont pas si nocifs que cela, Michel Desmurget fait partie des fervents offenseurs de ce qu’il considère comme un fléau. Il s’appuie donc sur de nombreuses études sérieuses pour prouver par A+B que les écrans sont un véritable fléau pour le développement des enfants. Le constat est alarmant : les plus petits passent beaucoup trop de temps devant les écrans et cela a des conséquences sur le langage, les résultats scolaires, la concentration, la santé… Il est donc temps d’en prendre conscience et d’imposer des limites.

C’est ainsi qu’il donne également quelques conseils aux parents désireux de protéger leurs enfants de tout cela.

8. Zone critique

Le texte est conséquent, les références aux études scientifiques très nombreuses, mais elles ont le mérite de donner aux propos de Michel Desmurget toute leur crédibilité.

C’est un ouvrage à mettre entre les mains de tous les parents et de tous les professionnels de l’enfance !

9. Pour aller plus loin

Ouvrage recensé– La Fabrique du crétin digital, Les dangers des écrans pour nos enfants, Paris, Seuil, 2019.

Du même auteur– TV Lobotomie. La vérité scientifique sur les effets de la télévision, Paris, Max Milo, 2011.– L’Antirégime. Maigrir pour de bon, Paris, Belin, 2015.

Autre piste– Jean-François Bach (dir.), L’enfant et les écrans - Avis de l'Académie des Sciences, Paris, Le Pommier, 2013.

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